Uzbekistan, Wanderings on the Silk Road

English translation at the end of the article.

Ouzbékistan, Pérégrinations sur la Route de la Soie

Je pousse les portes de l’hôtel Intercontinental de Tachkent et demande la direction de la discothèque. Le night-club de l’hôtel m’a été conseillé par un pilote d’Air France Cargo qui vient régulièrement en Ouzbékistan voir sa fiancée. L’hôtesse du night-club m’interpelle au milieu du hall et me demande de la suivre. La blonde russophone m’emmène au carré VIP. « C’est un peu plus cher mais beaucoup mieux » me dit-elle. Nous contournons la piste de danse. Des pin-up ouzbèkes se déhanchent sous le regard vitreux d’hommes d’affaires au bar. La jeune femme me fait entrer par une porte dérobée dans une petite salle privée…

Nous sommes deux au carré VIP. Moi, et une caricature de GI black au crâne rasé, les mains pleines de dollars qu’il insère dans le string des filles dénudées qui font leur show… Qu’est-ce que je fais là ?! J’avais demandé au pilote Air France un endroit sympa pour passer une dernière soirée en Ouzbékistan avant de retourner sur Paris. On a dû mal se comprendre !

Et le GI, que fait-il là lui aussi ? La nostalgie sans doute ! Islam Karimov, président autoritaire de l’Ouzbékistan, a fait fermer la base militaire américaine de Khanabad au sud du pays, il y a un an. Je demande au GI s’il vient de l’autre base américaine, au Kirghizistan. Il me dit d’aller me faire voir ! J’obtempère. Le GI fait 2m de haut pour autant de large…

Je compte mes billets pour écouler mes petites coupures de fin de voyage. J’ai de l’argent dans toutes les poches et tous mes papiers sont en vrac. Je me suis fait contrôler par une brigade de police zélée sur « Broadway ». L’avenue Sayilgoh, surnommée « Broadway », est la promenade préférée des habitants de Tachkent pour flâner l’après-midi et s’amuser la nuit !

Jeunes Femmes de Tachkent, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan

Jeunes Femmes de Tachkent, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan

Tachkent, porte d’entrée de la route de la Soie en Ouzbékistan, n’a pas le charme de ses sœurs du désert, Khiva, Boukhara et Samarkand. Tachkent, la « cité de pierre » en turc, est aujourd’hui une cité de verre et de béton, le centre d’affaires et politique du pays. Une ville à la croisée des chemins où les pin-up émancipées en mini jupes et téléphones portables, côtoient des femmes voilées de la tête au pied. Une ville où s’érigent des tours de plus en plus hautes et des centres commerciaux toujours plus modernes, comme pour crier sa volonté d’entrer de pleins pieds dans le monde capitaliste international.

La statue de Tamerlan, dans le square Amir Temur de Tachkent, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La statue de Tamerlan, dans le square Amir Temur de Tachkent, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

« Broadway » est longée de cafés restaurants turcs et géorgiens, de chachliks, et de bars branchés aux décors occidentaux. L’avenue mène au square Amir Temur où la statue de « Tamerlan le Conquérant », a détrôné celle de Marx.

Considéré comme un barbare sanguinaire sous l’ère soviétique, Islam Karimov a fait de « Tamerlan », le modèle de la jeune nation indépendante Ouzbèke... Depuis qu’il a pris le pouvoir en 1990, Islam Karimov a interdit tous les partis d’opposition et réprimé le moindre courant dissident. Il a mis les médias sous tutelle, et tous les aspects de la vie sociale, économique et culturelle sont sous son contrôle. Au musée de Tamerlan, près du square Amir Temur, Tamerlan et Islam Karimov se côtoient si intimement que l’on se demande à qui le musée est réellement consacré ! 

Je mangeais des brochettes de viande à un barbecue fumant de « chachlik » sur « Broadway » quand un groupe de policiers m’a embarqué sans raison. Après une fouille en règle, le gradé du poste m’a reconduit en ville. « Je suis désolé pour ce contrôle de routine, on est sur le qui-vive », m’a-t-il dit, « à traquer les filières d’opium et d’héroïne afghanes, et les réseaux terroristes du MIU ». C’est quoi le MIU ? « Le Mouvement Islamiste Ouzbek, basé dans les vallées du nord du Tadjikistan, soutenu par les talibans », ajoute-t-il, « qui fait des incursions dans la vallée de Fergana et menace la stabilité de l’Asie Centrale »… Je lui concède que je ressemble effectivement à un afghano-iranien !...

Dans le club VIP, le GI ne rate pas une miette des danseuses qui se trémoussent, et sourit à pleines dents, un énorme cigare en bouche. Quelle caricature !.e.. J’ai terminé de vider mes poches. Ma table est couverte de billets. Je compte et recompte les tas de billets et me remémore les débuts de mon périple en terre ouzbeke, commencé quelques semaines plus tôt, ici même à l’aéroport de Tachkent…

La route en minibus entre Nukus et Ourguentch, le long de du fleuve Amou-Daria, en Ouzbékistan...

La route en minibus entre Nukus et Ourguentch, le long de du fleuve Amou-Daria, en Ouzbékistan...

Je me rappelle l’Airbus flambant neuf de l’Ouzbékistan Airlines complètement vide qui me dépose sur le tarmac de Tachkent. Nous sommes 4 dans l’avion ! Une tennis-woman ouzbèke et son coach avec moi en seconde, et un jeune d’une ONG avec un gilet de reporter et une écharpe blanche voyageant à l’avant en business. Aussitôt débarqué, je prends un bimoteur pour Nukus, dans la région du Karakalpakstan, au Far West de l’Ouzbékistan. Ce sera après un tour de ce qu’il reste de la Mer d’Aral, le point de départ de « ma Route de la Soie…

La vieille terre Ouzbek est célèbre pour ses villes des mille et une nuits. Khiva, Boukhara et Samarkand sont trois joyaux sur la route de la soie parmi les plus belles villes du monde. Elles sont pour l’Ouzbékistan un trésor architectural sans pareil. Et pourtant, Ludmilla, une guide ouzbèke rencontrée à Boukhara, me dira que les touristes ont littéralement fuis le pays depuis quelques années. L’Ouzbékistan a une frontière commune avec tous les pays de l’Asie Centrale, dont l’Afghanistan. Ludmilla, coiffée et habillée à la mode européenne, accompagne un groupe de vieilles anglaises dans leur périple sur la route de la soie. « Ouzbékistan, Afghanistan, Pakistan… Les pays qui terminent pas « Stan » continuent de faire peur depuis le traumatisme même lointain du 11 septembre » me lâche Ludmilla dans un soupir.

Ourguentch en Ouzbékistan...

Ourguentch en Ouzbékistan...

La route en minibus entre Nukus et Ourguentch longe paisiblement le fleuve Amou-Daria, vaste et majestueux. Rien à voir avec le mince filet d’eau arrivant péniblement jusqu’à la mer d’Aral. Le trajet se fait sans encombre, hormis les arrêts successifs du chauffeur pour acheter des Sazans aux rares pêcheurs à la ligne. Le Sazan est une sorte de grosse carpe très convoitée de l’Amou-Daria, dont nous partagerons le fumet tout au long du trajet.

Nukus et Ourguentch sont deux villes de l’ère Soviétique, désolées et désolantes, quadrillées par des artères démesurément larges et désespérément vides. Bien que sans intérêt, Ourgentcht a l’avantage de constituer une base arrière intéressante pour visiter Khiva à une dizaine de kilomètres. L’hôtellerie y est moins chère et il est facile de trouver des taxis collectifs pour Khiva à cinquante centimes d’Euro par personne. Je profite de mon arrêt à Ourgentcht pour donner des nouvelles à Isabelle dans un cybercafé bondé de jeunes ouzbeks jouant à une simulation de combat en réseau. Les jeunes m’accueillent la main sur le cœur. C’est comme cela que l’on se dit bonjour en Ouzbékistan. C’est ainsi, la main sur le cœur, qu’un marchand de soie m’a vendu des étoffes dans la vallée de Fergana, ou qu’un vieil homme m’a salué à dos d’âne dans les steppes autours de Tachkent...

Il n’y a pas d’insécurité en Ouzbékistan. Hormis quelques arnaqueurs qui vous font le coup du porte-monnaie trouvé par terre dans les bazars où vous venez de faire du change au noir. La vie est sécurisée par la mafia ouzbèke qui tient la plupart des hôtels et des restaurants, et qui a tout intérêt à ce que le séjour des touristes se passe sans accroc…

Les jeunes Ouzbeks du cybercafé, avides d’informations du monde extérieur, m’emmènent passer la soirée en ville. L’occasion de parler géopolitique et de refaire le monde autour de quelques bières russes « Baltika », et d’un grand plat de Plov, du riz pilaf à la viande de mouton, le plat national Ouzbek.

 Plov et Chachlik, des spécialités culinaires Ouzbèkes.

Plov et Chachlik, des spécialités culinaires Ouzbèkes.

Les trois villes mythiques de la route de la soie, Khiva, Boukhara et Samarcande, sont de véritables musées à ciel ouvert, peuplées d’habitants qui en sont l’âme et le moteur.

Artisans à Khiva, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Artisans à Khiva, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

L’histoire y est vivante et palpable au coin des rues. Les ateliers d’artisans comme au moyen age, abritent des sculpteurs sur bois, des soufflets de forge haletant, des tours de potiers couinant, et des cuves de teinturiers glougloutant. Les mosquées et les mazars (tombeaux) restent des lieux de pèlerinage comme il y a mille ans.

Entrée de la vielle ville de Khiva, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Entrée de la vielle ville de Khiva, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vielle ville de Khiva, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vielle ville de Khiva, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Des trois perles du désert ouzbek, Khiva est à la fois la ville la moins touristique et la plus authentique. Elle prend ses origines aux 5e Siècle avant JC, mais d’après la légende, son histoire commence à l’aube des temps, avec la construction d’un puits par Sem, un des fils de Noé.

La vielle ville de Khiva et le Kalat Minar sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vielle ville de Khiva et le Kalat Minar sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vielle ville de Khiva, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vielle ville de Khiva, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le cimetière de la vielle ville de Khiva, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le cimetière de la vielle ville de Khiva, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Khiva prospéra du commerce de la Soie avec l’arrivée des arabes au 8ème siècle après JC, pour devenir la principale puissance économique de l’Orient musulman. Résistant aux assauts successifs de Gengis Khan, Khiva succombera sous Tamerlan, qui ruinera la ville pour restaurer la grandeur de Samarcande.

Mosquée de la vielle ville de Khiva, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Mosquée de la vielle ville de Khiva, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vielle ville de Khiva et le Kalat Minar sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vielle ville de Khiva et le Kalat Minar sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Khiva est constituée de deux villes imbriquées l’une dans l’autre. Dichan kala, la ville extérieure et Itchan kala, la ville intérieure, séparée par une double enceinte en pisé. C’est grâce à ses fortifications qu’elle tombera bien plus tard que Boukhara et Samarcande sous le pouvoir de l’Empereur de toute les Russies en 1860.

La vielle ville de Khiva et le Kalat Minar sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vielle ville de Khiva et le Kalat Minar sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Il fait un beau soleil sur Khiva et les jeunes femmes ouzbèkes se promènent dans de longues robes multicolores. Soucieuse de protéger la blancheur de leur peau, elles prennent toutes le soin de s’abriter sous des ombrelles Des couples viennent de tout le pays pour se marier dans les décors hollywoodiens de cette ville des milles et une nuit. Les mariages se succèdent au pied du Kalta Minar, l’édifice le plus marquant de Khiva.

La vielle ville de Khiva et le Kalat Minar sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vielle ville de Khiva et le Kalat Minar sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vielle ville de Khiva et le Kalat Minar sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vielle ville de Khiva et le Kalat Minar sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Kalta Minar est un minaret « avorté » recouvert de céramique bleue. Sa construction a été stoppée à 28m de haut à la mort du Khan. Il devait devenir l’édifice le plus haut du monde musulman. Je retiendrai également de Khiva le souvenir d’un repas traditionnel mémorable pour 3 Euros dans la cour intérieure d’une maison particulière. Un déjeuner fastueux allongé sur le tapchan devant une table basse recouverte d’amandes, d’olives, de chorbo (soupe), de plov, et d’une multitude de légumes inconnus, dont je ne connais le nom qu’en Ouzbèk. A la fin du repas, je converserai avec mes hôtes en sirotant un thé noir fumant et parfumé, me mettant ainsi tranquillement au diapason de l’Orient…

Famille de Khiva sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Famille de Khiva sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La traversée à 45 °C à l’ombre du désert des sables ocre du Kyzylkoum entre Khiva et Boukhara est interminable. Le bus traverse des paysages sans horizons d’où surgissent des yourtes et des chameaux entravés... Étonnant de voir autant de faciès différents parmi les passagers du bus. Ouzbeks turcophones, Tadjiks, Kazakhs, Tatars et Karakalpaks, les caravanes qui ont sillonnées la route de la soie pendant 3000 ans, ont généré en Ouzbékistan un gigantesque brassage des populations.

La vieille ville de Boukhara et son célèbre Minaret Kalon, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vieille ville de Boukhara et son célèbre Minaret Kalon, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Il faut normalement 9 heures de bus pour relier les 500 km qui séparent Khiva de Boukhara. La route le long de l’Amou Daria, passe sur quelques kilomètres à travers un appendice du Turkménistan, qui permet au pays de contrôler une partie du fleuve. Entre un arrêt douanier problématique à cause de mon visa qui n’était pas multi entrée, et une panne d’amortisseur, le trajet durera 14h !

Jeunes filles de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Jeunes filles de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Pour le voyageur en caravane qui arrivait à Boukhara guidé par les 47 mètres du minaret Kalon, véritable phare du désert, Boukhara jaillissait de l’horizon comme une promesse de paradis au terme d’un long et dangereux périple chargé de trésors.

La vieille ville de Boukhara et son célèbre Minaret Kalon, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La vieille ville de Boukhara et son célèbre Minaret Kalon, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Mosquée de la vieille ville de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Mosquée de la vieille ville de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

J’arriverai pour ma part à Boukhara de nuit, et séjournerai par hasard dans la famille qui a hébergé Pricilla Telmon et Sylvain Tesson lors de leur périple à cheval sur la route de la soie. La famille me montre avec fierté le livre « Carnet des Steppes » que les deux aventuriers leurs ont envoyé dédicacé. Ils gardent d’eux un merveilleux souvenir, regrettant seulement qu’ils mentionnent dans leur livre que Gengis Khan utilisait le minaret Kalon de la grande mosquée comme tour punitive pour y jeter quelques-uns de ses sujets. « Il y a tellement d’autres choses à dire sur Boukhara », soupirent-ils.

Jeux de société à Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Jeux de société à Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Mausolée des Samanides à Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Mausolée des Samanides à Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

La ville, mystérieuse et secrète, tire son nom du mot Monastère en sanscrit. Et pour cause, Boukhara compte plus de 360 mosquées, une par rue, bâties sur 10 siècles d’histoire.

Mosquée de la vieille ville de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Mosquée de la vieille ville de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Souk de la vieille ville de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Souk de la vieille ville de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Passant de main en main à travers les siècles, la ville sera détruite à maintes reprises et renaîtra à chaque fois de ses cendres grâce à sa position stratégique au carrefour de l’Inde de la Russie, de la Chine et de l’Iran. Gengis Khan l’assiègera pour venger l’attaque d’une caravane mongole et l’assassinat de ses ambassadeurs. Tamerlan la rasera comme Khiva pour restaurer la splendeur de Samarcande.

Citadelle Ark, la Forteresse de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Citadelle Ark, la Forteresse de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Citadelle Ark, la Forteresse de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Citadelle Ark, la Forteresse de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Citadelle Ark, la Forteresse de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Citadelle Ark, la Forteresse de Boukhara, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Et alors que Samarcande sombrera dans la luxure, Boukhara reprendra le devant de la scène religieuse pour devenir la ville sainte de l’Islam en Asie Centrale. Boukhara est aujourd’hui la 5ème ville sainte de l’islam après la Mecque, Médine, Jérusalem et Hébron. Et au temps de l’URSS, 3 pèlerinages à Boukhara équivalaient à un pèlerinage à la Mecque.

Il y a 300 km de Boukhara à Samarcande. Seulement 300 oserai-je dire. Malchanceux avec les bus depuis le début du voyage, je paye quelques euros à Igor, un chauffeur de camion, pour qu’il me prenne en stop.

L’occasion de partager avec lui le « meilleur Plov du pays » dans une gargote à quelques km avant Samarcande, et de l’écouter me parler de ses doubles voire triples boulots, pour faire vivre sa famille.

« Un quart de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté. Des salaires et des pensions de retraite ne sont pas payés. Pendant ce temps, la famille Karimov ne cesse de s’enrichir…Gulmila, la fille d’Islam Karimov, aussi belle que sans scrupule, s’est bâti un empire financier qui fait d’elle l’une des femmes les plus riches du monde ! » me dit-il…

Igor me dépose dans l’après-midi à Samarcande, aux pieds du mythique Régistan, un ensemble de trois medersas (écoles) se faisant face dans un accord parfait.

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Les façades du Régistan aux motifs et émaux multicolores, changent de couleurs au cours de la journée. Elles passent du bleu le matin au vert l’après-midi, jusqu’à prendre une teinte Or lorsque le soleil se couche...

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

J’entre à la barbe des gardiens dans une des tours du Régistan. Il n’y a la place que pour une personne dans l’escalier étroit qui mène au sommet. On y grimpe en tâtonnant à quatre pattes dans une obscurité totale. En haut de la tour, la vue panoramique sur la cité est prodigieuse. On embrasse du regard plusieurs siècles d’histoire imprégnés de luttes et de passions.

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Samarcande a vu passer les rois et les dynasties, et a subi les destructions et la convoitise de plusieurs civilisations. Le secret de sa survie à travers les âges ? Avoir su accepter, accueillir et charmer les envahisseurs successifs sans jamais se soumettre. Un secret qui lui a permis au fil des invasions, de devenir plus forte que l’usure des pouvoirs…

Le mausolée Gour Emir de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le mausolée Gour Emir de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Au loin, j’aperçois la coupole azur et cannelée du mausolée Gour Emir où repose le sarcophage de Tamerlan. Sur le fronton du mausolée Gour Emir figure une inscription à méditer en ces temps difficiles : « Heureux celui qui a refusé le monde avant que le monde ne le refuse ! »… 

Ville de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Ville de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Vieille de 2500 ans, Samarcande s’est enrichie du commerce de la soie jusqu’à ce que son secret de fabrication soit découvert par des missionnaires, qui ramèneront des œufs de vers à soie dans leur battons de pèlerins.

Marchandes de Soie de Khan Atlas, à Marguilan, dans la vallée de Fergana en Ouzbékistan...

Marchandes de Soie de Khan Atlas, à Marguilan, dans la vallée de Fergana en Ouzbékistan...

La perle de l’Est, comme elle est décrite dans les manuscrits Arabes, sera conquise et rasée par Gengis Khan en 1220. Et c’est Tamerlan, chef de clan Mongol Turquisé qui redonnera à la ville toute sa grandeur. Tamerlan, destructeur inhumain et bâtisseur passionné, rasera les autres villes de la route de la soie, et déportera à Samarkand les meilleurs artistes, artisans et architectes d’orient, pour y ériger le centre de l’univers culturel, scientifique et économique de son empire…

Le Marché de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Marché de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Marché de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Marché de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Du haut de la tour du Régistan, je couvre du regard le témoignage architectural du rêve de Tamerlan. Des monuments colossaux. Des minarets élancés, des palais fastueux, des mosquées majestueuses aux coupoles recouvertes d’émaux couleur ciel. Un jardin éternel de pierre azur qui fait de Samarcande, « la plus belle face que la Terre ait jamais tournée vers le soleil », telle que la décrivait le poète perse Omar Khayan…

Le Marché de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Marché de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Je loue un taxi pour remonter à l’origine de la route de la soie jusqu’à Marguilan dans la vallée de Fergana.

Marguilan, une cité ancienne du 1er siècle avant JC est connue comme l’un des centres de production de soie de l’Asie centrale. D’après le dicton, « un mètre de soie de Marguilan vaut toutes les terres de Boukhara ».

Marchandes de pain dans la vallée de Fergana en Ouzbékistan...

Marchandes de pain dans la vallée de Fergana en Ouzbékistan...

Khan Atlas, à Marguilan, est la plus grande usine de confection de soie d’Asie Centrale. J’y découvre toutes les étapes de la fabrication de la soie et du cocon. Des adolescents filent la soie tandis que des jeunes femmes aux robes multicolores fabriquent les étoffes derrière des métiers mécaniques traditionnels, dans un vacarme de claquement de bois et d’engrenage. Les jeunes filles s’amusent de voir l’une d’entre elles gênée devant moi, de cracher de l’eau sur les fils de soie de son métier à tisser pour les assouplir…

Khan Atlas, à Marguilan, dans la Vallée de Fergana en Ouzbékistan, est la plus grande usine de confection de soie d’Asie Centrale.

Khan Atlas, à Marguilan, dans la Vallée de Fergana en Ouzbékistan, est la plus grande usine de confection de soie d’Asie Centrale.

J’ai compté une douzaine de contrôles de passeports dans la vallée de Fergana, entre Tachkent et Marguilan. Tunnels, ponts, cols de montagne, il y a des check points de l’armée à tous les points géostratégiques de la vallée. Les soldats tendus au premier abord, me lance systématiquement « Francia, Zidane » dans un large sourire, à chaque fois que je leurs présente mon passeport français.

 

Khan Atlas, à Marguilan, dans la Vallée de Fergana en Ouzbékistan, est la plus grande usine de confection de soie d’Asie Centrale.

Khan Atlas, à Marguilan, dans la Vallée de Fergana en Ouzbékistan, est la plus grande usine de confection de soie d’Asie Centrale.

La vallée de Fergana, la plus grande Oasis de l’Asie Centrale, est une région sensible en raison de sa position charnière entre l’Ouzbékistan, le Tadjikistan et le Kirghizistan, et à cause de contentieux sur le tracé des frontières. Convoitée depuis toujours pour sa richesse et sa position stratégique entre la Chine et l’Europe, la Vallée de Fergana est la boite de pandore de l’Asie Centrale. Et la révolte d’Andijan réprimée dans le sang il y a quelques années, est toujours palpable dans l’air…

Khan Atlas, à Marguilan, dans la Vallée de Fergana en Ouzbékistan, est la plus grande usine de confection de soie d’Asie Centrale.

Khan Atlas, à Marguilan, dans la Vallée de Fergana en Ouzbékistan, est la plus grande usine de confection de soie d’Asie Centrale.

Les 12 et 13 mai 2005, une centaine d’hommes en armes, rejoints plus tard par des partisans et des curieux, prennent d’assaut la prison d’Andijan pour libérer une vingtaine d’hommes accusés d’être des terroristes islamiques. Le groupe investit ensuite des garnisons militaires et des bâtiments administratifs, et mettent en place des tribunes où des habitants prennent la parole pour critiquer le gouvernement. Des troupes d’élites, dépêchées par Tachkent tirent alors sur la foule faisant 176 morts selon les autorités, cinq fois plus selon le CICR… Selon Tachkent les insurgés viennent de groupes islamiques du MIU, infiltrés dans le pays à partir du Kirghizistan, et servent des intérêts étrangers.

Khan Atlas, à Marguilan, dans la Vallée de Fergana en Ouzbékistan, est la plus grande usine de confection de soie d’Asie Centrale.

Khan Atlas, à Marguilan, dans la Vallée de Fergana en Ouzbékistan, est la plus grande usine de confection de soie d’Asie Centrale.

Peu après le 11 septembre, Islam Karimov a accepté de soutenir les EU dans leur guerre contre le terrorisme. L’Ouzbékistan a offert le camp de Khanabad pour servir de base arrière aux opérations de guerre en Afghanistan, en contrepartie des avions flambants neufs de l’Ouzbékistan Airlines ! Tachkent n’a pas apprécié que les Etats-Unis critiquent le massacre d’Andijan, et surtout que l’ONU transfère en Roumanie des insurgés qui s’étaient réfugiés au Kirghizistan, avec l’aide des bases américaines en Asie Centrale. La réaction d’Islam Karimov, craignant que Washington encourage un changement de régime dans son pays, ne s’est pas faite attendre. Le groupe de Shanghai, rassemblant la Chine, la Russie et quatre pays d’Asie Centrale, appelait 2 mois plus tard au retrait des bases américaines dans la région. Fin Juillet 2005, Tachkent signifiait à l’ambassade américaine, que les Etats-Unis disposaient de 6 mois pour évacuer la base de Khanabad au sud du pays. Les américains ont quitté la base Ouzbèke en Novembre 2005, et ont réussi à garder une base au Kirghizistan avec en toile de fond la main mise sur le pétrole d’Asie Centrale. La région pourrait vivre paisiblement, si la présence d’hydro carburants en quantité colossale ne l’avait pas projeté dans le jeu géopolitique des grandes puissances.

Difficile de faire un bilan de ce voyage en Ouzbékistan. Un pays dont la richesse architecturale et l’hospitalité biblique des ses habitants en ferait presque oublier la dictature des Karimov, et l’enjeu géostratégique international dans lequel la région toute entière est plongée… La jeune Ouzbèke dénudée du carré VIP termine sa danse collée contre le GI qui sourit de toutes ses dents. La jeune femme prend ses dollars et vient vers moi. Je lui fais signe que je passe mon tour, termine ma « Baltika », et retourne à l’hôtel terminer son sac.

Khan Atlas, à Marguilan, dans la Vallée de Fergana en Ouzbékistan, est la plus grande usine de confection de soie d’Asie Centrale.

Khan Atlas, à Marguilan, dans la Vallée de Fergana en Ouzbékistan, est la plus grande usine de confection de soie d’Asie Centrale.

EPILOGUE : Islam KARIMOV décède en 2016. Sa mort marque la fin d’une époque en Ouzbékistan. Sous son régime qui a duré 27 ans, les droits et les libertés furent loin d’être respectés : toute dissidence fut violemment réprimée, et la torture et les détentions arbitraires devinrent la marque de fabrique du système judiciaire. Des centaines de personnes sont mortes dans le massacre d’Andijan, pour lequel personne n’a eu à rendre des comptes. Des milliers de citoyens ont fini derrière les barreaux à l’issue de procès iniques.

C’est Shavkat Miromonovich, qui a succédé à Islam Karimov à la présidence de l’Ouzbekistan, le 8 septembre 2016, après avoir été Premier Ministre du 11 décembre 2003 au 14 décembre 2016.

Au cours de son mandat, et toujours en exercice, M. Mirziyoyev a lancé une série de réformes politiques, économiques et sociales. Par exemple, l'interdiction le travail des enfants et le travail forcé dans l'industrie du coton ont été interdits, ce qui a mis fin à une pratique très répandue dans le pays.

En 2023, les réformes de Mirziyoyev visent à faire de l'Ouzbékistan une économie ouverte attirant les entreprises et les investissements étrangers en Ouzbékistan. Parmi les priorités de Mirziyoyev figurent notamment la lutte contre la corruption et la bureaucratie, ainsi que l'élimination des barrières commerciales… A suivre…

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Le Régistan de Samarcande, sur la Route de la Soie en Ouzbékistan...

Uzbekistan, Wanderings on the Silk Road

I push open the doors of the Intercontinental hotel in Tashkent and ask for directions to the nightclub. The hotel nightclub was recommended to me by an Air France Cargo pilot who regularly comes to Uzbekistan to see his fiancée. The nightclub hostess calls out to me in the middle of the hall and asks me to follow her. The Russian-speaking blonde takes me to the VIP room. “It’s a little more expensive but much better,” she told me. We walk around the dance floor. Uzbek pin-ups sway their hips under the glassy gaze of businessmen at the bar. The young woman takes me through a back door into a small private room…

There are two of us in the VIP square. Me, and a caricature of a black GI with a shaved head, his hands full of dollars that he inserts into the thongs of the naked girls who are doing their show... What am I doing here?! I asked the Air France pilot for a nice place to spend one last evening in Uzbekistan before returning to Paris. We must have misunderstood each other!

And what is the GI doing there too? Nostalgia no doubt! Islam Karimov, authoritarian president of Uzbekistan, closed the American military base at Khanabad in the south of the country a year ago. I ask the GI if he comes from the other American base, in Kyrgyzstan. He tells me to fuck off! I comply. The GI is 2m high and just as wide...

I count my banknotes to use up my small bills at the end of my trip. I have money in every pocket and all my papers are in bulk. I was stopped by a zealous police squad on “Broadway”. Sayilgoh Avenue, nicknamed “Broadway”, is the favorite promenade of Tashkent residents for strolling in the afternoon and having fun at night!

Tashkent, the gateway to the Silk Road in Uzbekistan, does not have the charm of its desert sisters, Khiva, Bukhara and Samarkand. Tashkent, the “city of stone” in Turkish, is today a city of glass and concrete, the business and political center of the country. A city at the crossroads where emancipated pin-ups in mini skirts and cell phones rub shoulders with women veiled from head to toe. A city where ever taller towers and ever more modern shopping centers are being erected, as if to shout its desire to enter the international capitalist world.

“Broadway” is lined with Turkish and Georgian café restaurants, shashliks, and trendy bars with Western decor. The avenue leads to Amir Temur Square where the statue of “Tamerlane the Conqueror” has dethroned that of Marx.

Considered a bloodthirsty barbarian during the Soviet era, Islam Karimov made “Tamerlan” the model of the young independent Uzbek nation... Since he took power in 1990, Islam Karimov has banned all political parties of opposition and repressed the slightest dissident current. He has placed the media under supervision, and all aspects of social, economic and cultural life are under his control. At the Tamerlan Museum, near Amir Temur Square, Tamerlan and Islam Karimov rub shoulders so intimately that one wonders to whom the museum is really dedicated! 

I was eating skewers of meat at a steaming “shachlik” barbecue on “Broadway” when a group of police officers picked me up for no reason. After a thorough search, the officer at the station took me back to town. “I’m sorry for this routine check, we are on alert,” he told me, “tracking down the Afghan opium and heroin networks, and the MIU terrorist networks.” What is MIU? “The Uzbek Islamist Movement, based in the valleys of northern Tajikistan, supported by the Taliban,” he adds, “which is making incursions into the Fergana valley and threatening the stability of Central Asia”… I tell him concede that I do indeed look like an Afghan-Iranian!...

In the VIP club, the GI doesn't miss a beat of the dancing dancers, and smiles toothily, an enormous cigar in his mouth. What a caricature!... I finished emptying my pockets. My table is covered in bills. I count and recount the piles of bank notes and remember the beginnings of my journey in Uzbek territory, started a few weeks earlier, right here at Tashkent airport...

I remember the brand new Uzbekistan Airlines airbus, completely empty, which dropped me off on the tarmac in Tashkent. There are 4 of us on the plane! An Uzbek tennis woman and her coach with me in second grade, and a young guy from an NGO with a reporter's vest and a white scarf traveling up front on business. As soon as I disembark, I take a twin-engine plane to Nukus, in the Karapakalstan region, in the Far West of Uzbekistan. It will be after a tour of what remains of the Aral Sea, the starting point of “my Silk Road…

The old Uzbek land is famous for its Arabian Nights cities. Khiva, Bukhara and Samarkand are three jewels on the Silk Road among the most beautiful cities in the world. They are an unparalleled architectural treasure for Uzbekistan. And yet, Ludmilla, an Uzbek guide I met in Bukhara, will tell me that tourists have literally fled the country for several years. Uzbekistan has a common border with all the countries of Central Asia, including Afghanistan. Ludmilla, dressed in European fashion, accompanies a group of old English women on their journey on the Silk Road. “Uzbekistan, Afghanistan, Pakistan… The countries that end with “Stan” continue to scare people since the even distant trauma of September 11,” Ludmilla tells me with a sigh.

The minibus route between Nukus and Urgencht peacefully runs along the vast and majestic Amu Darya River. Nothing to do with the thin trickle of water arriving painfully to the Aral Sea. The journey is uneventful, apart from the driver's successive stops to buy Sazans from the rare anglers. The Sazan is a kind of large, highly coveted carp from the Amu Daria, whose aroma we will share throughout the bus journey!

Nukus and Ourgentcht are two desolate Soviet-era towns, crisscrossed by disproportionately wide and desperately empty arteries. Although uninteresting, Ourgencht has the advantage of constituting an interesting rear base for visiting Khiva, about ten kilometers away. Hotels are cheaper there and it is easy to find shared taxis for Khiva at fifty Euro cents per person. I take advantage of my stop in Urgencht to give Isabelle some news in an internet café crowded with young Uzbeks playing a network combat simulation. The young people welcome me with their hands on their hearts. This is how we say hello in Uzbekistan. This is how, with his hand on his heart, a silk merchant sold me fabrics in the Fergana valley, or an old man greeted me on the back of a donkey in the steppes around Tashkent ...

There is no insecurity in Uzbekistan. Apart from a few scammers who trick you with your wallet found on the ground in the bazaars where you have just done black exchange. Life is made safe by the Uzbek mafia which runs most of the hotels and restaurants, and which has every interest in ensuring that the tourists' stay goes off without a hitch...

The young Uzbeks from the internet café, eager for information from the outside world, take me to spend the evening in town. The opportunity to talk geopolitics and remake the world around a few Russian “Baltika” beers and a large dish of Plov, rice pilaf with mutton, the Uzbek national dish.

The three mythical cities of the Silk Road, Khiva, Bukhara and Samarkand, are veritable open-air museums, populated by inhabitants who are their soul and driving force.

History is alive and palpable on the street corners. The artisan workshops, as in the Middle Ages, house wood sculptors, panting forge bellows, squealing potters' wheels, and gurgling dyers' vats. Mosques and mazars (tombs) remain places of pilgrimage as they were a thousand years ago.

Of the three pearls of the Uzbek desert, Khiva is both the least touristy and the most authentic city. Its origins date back to the 5th century BC, but according to legend, its history begins at the dawn of time, with the construction of a well by Shem, one of Noah's sons.

Khiva prospered from the silk trade with the arrival of the Arabs in the 8th century AD, to become the main economic power of the Muslim East. Resisting the successive assaults of Genghis Khan, Khiva succumbed under Tamerlane, who ruined the city to restore the greatness of Samarkand. Khiva is made up of two cities nested within each other. Dichan kala, the outer city and Itchan kala, the inner city, separated by a double adobe enclosure. It is thanks to its fortifications that it fell much later than Bukhara and Samarkand under the power of the Emperor of All Russia in 1860.

It's sunny in Khiva and young Uzbek women are walking around in long, multi-colored dresses. Anxious to protect the whiteness of their skin, they all take care to shelter themselves under umbrellas. Couples come from all over the country to get married in the Hollywood settings of this city of a thousand and one nights. Weddings follow one another at the foot of the Kalta Minar, the most striking building in Khiva.

The Kalta Minar is an “aborted” minaret covered in blue ceramic. Its construction was stopped at 28m high when the Khan died. It was to become the tallest building in the Muslim world. I will also remember from Khiva the memory of a memorable traditional meal for 3 Euros in the interior courtyard of a private house. A sumptuous lunch lying on the tapchan in front of a coffee table covered with almonds, olives, chorbo (soup), plov, and a multitude of unknown vegetables, the names of which I only know in Uzbek. At the end of the meal, I will converse with my hosts while sipping a steaming and fragrant black tea, thus putting myself quietly in tune with the Orient...

The crossing at 45°C in the shadow of the ocher sands of Kyzylkum desert between Khiva and Bukhara is endless. The bus crosses horizonless landscapes from which yurts and hobbled camels emerge... Surprising to see so many different faces among the bus passengers. Turkish-speaking Uzbeks, Tajiks, Kazakhs, Tatars and Karakalpaks, the caravans which crisscrossed the Silk Road for 3000 years, generated a gigantic mixing of populations in Uzbekistan.

It normally takes 9 hours by bus to connect the 500 km that separate Khiva from Bukhara. The road along the Amu Darya passes for a few kilometers through an appendage of Turkmenistan, which allows the country to control part of the river. Between a problematic customs stop because of my visa which was not multi-entry, and a shock absorber failure, the journey will last 14 hours!

For the traveler in a caravan who arrived in Bukhara guided by the 47 meters of the Kalon minaret, a true lighthouse of the desert, Bukhara rose from the horizon like a promise of paradise at the end of a long and dangerous journey loaded with treasures.

For my part, I will arrive in Bukhara at night, and will by chance stay with the family who hosted Pricilla Telmon and Sylvain Tesson during their horseback journey on the Silk Road. The family proudly shows me the book “Carnet des Steppes” that the two adventurers sent them autographed. They have wonderful memories of them, only regretting that they mention in their book that Genghis Khan used the Kalon minaret of the great mosque as a punitive tower to throw some of his subjects there. “There are so many other things to say about Bukhara,” they sigh.

The city, mysterious and secret, takes its name from the word Monastery in Sanskrit. And for good reason, because Bukhara has more than 360 mosques, one per street, built over 10 centuries of history.

Passing from hand to hand over the centuries, the city will be destroyed many times and will be reborn each time from its ashes thanks to its strategic position at the crossroads of India, Russia, China and Iran. Genghis Khan besieged it to avenge the attack on a Mongol caravan and the assassination of his ambassadors. Tamerlane will raze it like Khiva to restore the splendor of Samarkand.

And while Samarkand will sink into lust, Bukhara will return to the forefront of the religious scene to become the holy city of Islam in Central Asia. Bukhara is today the 5th holiest city of Islam after Mecca, Medina, Jerusalem and Hebron. And in the days of the USSR, 3 pilgrimages to Bukhara were equivalent to one pilgrimage to Mecca.

It is 300 km from Bukhara to Samarkand. Only 300 I dare say. Unlucky with buses since the start of the trip, I pay a few euros to Igor, a truck driver, to pick me up.

The opportunity to share with him the “best Plov in the country” in a restaurant a few km before Samarkand, and to listen to him tell me about his double or even triple jobs, to support his family.

A quarter of the population lives below the poverty line. Salaries and pensions are not paid. Meanwhile, the Karimov family continues to grow rich...Gulmila, the daughter of Islam Karimov, as beautiful as she is unscrupulous, has built a financial empire which makes her one of the richest women in the world. world ! " he told me…

Igor drops me off in the afternoon in Samarkand, at the foot of the legendary Registan, a set of three madrasas (schools) facing each other in perfect harmony.

The facades of Régistan with their multicolored patterns and enamels change colors during the day. They change from blue in the morning to green in the afternoon, until they take on a gold hue when the sun sets...

I enter one of the Registan towers under the guards’ noses. There is only room for one person on the narrow staircase that leads to the top. I climb there, groping on all fours in total darkness. At the top of the tower, the panoramic view of the city is prodigious. I look across several centuries of history steeped in struggles and passions.

Samarkand has seen kings and dynasties pass, and has suffered the destruction and covetousness of several civilizations. The secret of its survival through the ages? Having known how to accept, welcome and charm successive invaders without ever submitting. A secret that allowed her, over the course of the invasions, to become stronger than the erosion of power...

In the distance, I see the azure and fluted dome of the Gour Emir mausoleum where Tamerlane's sarcophagus rests. On the pediment of the Gour Emir mausoleum there is an inscription to meditate on in these difficult times: “Happy is he who refused the world before the world refused him!” »…

2,500 years old, Samarkand grew rich from the silk trade until its manufacturing secret was discovered by missionaries, who brought back silkworm eggs in their pilgrim batons.

The pearl of the East, as it is described in Arab manuscripts, will be conquered and razed by Genghis Khan in 1220. And it is Tamerlane, Turkized Mongol clan chief who will restore the city to all its grandeur. Tamerlane, inhuman destroyer and passionate builder, will raze the other cities of the Silk Road, and will deport to Samarkand the best artists, craftsmen and architects of the East, to erect there the center of the cultural, scientific and economic universe of his empire…

From the top of the Registan tower, I can see the architectural testimony of Tamerlane's dream. Colossal monuments. Slender minarets, sumptuous palaces, majestic mosques with domes covered in sky-colored enamel. An eternal garden of azure stone which makes Samarkand, “the most beautiful face that the Earth has ever turned towards the sun”, as described by the Persian poet Omar Khayan…

I rent a taxi to go back to the origin of the Silk Road to Margilan in the Fergana Valley.

Margilan, an ancient city from the 1st century BC is known as one of the centers of silk production in Central Asia. According to the saying, “one meter of Margilan silk is worth all the lands of Bukhara”.

Khan Atlas, in Margilan, is the largest silk manufacturing factory in Central Asia. There I discover all the stages of silk and cocoon manufacturing. Teenagers spin silk while young women in multicolored dresses make fabrics behind traditional mechanical looms, to a din of clicking wood and gears. The young girls are amused to see one of them embarrassed in front of me, spitting water on the silk threads of her loom to soften them...

I counted a dozen passport controls in the Fergana Valley, between Tashkent and Margilan. Tunnels, bridges, mountain passes, there are army checkpoints at all geostrategic points in the valley. The soldiers, tense at first, systematically say “Francia, Zidane” to me with a broad smile, each time I present them with my French passport.

The Fergana Valley, the largest Oasis in Central Asia, is a sensitive region because of its pivotal position between Uzbekistan, Tajikistan and Kyrgyzstan, and because of disputes over the delimitation of borders. Always coveted for its wealth and its strategic position between China and Europe, the Fergana Valley is the Pandora's Box of Central Asia. And the Andijan revolt, bloodily repressed a few years ago, is still palpable in the air...

On May 12 and 13, 2005, around a hundred armed men, later joined by supporters and curious onlookers, stormed the Andijan prison to free around twenty men accused of being Islamic terrorists. The group then took over military garrisons and administrative buildings, and set up platforms where residents spoke to criticize the government. Elite troops, dispatched by Tashkent, then fired on the crowd, killing 176 people according to the authorities, five times more according to the ICRC... According to Tashkent, the insurgents came from Islamic groups of the MIU, infiltrated into the country from Kyrgyzstan, and served foreign interests.

Shortly after September 11, Islam Karimov agreed to support the US in its war against terrorism. Uzbekistan offered the Khanabad camp to serve as a rear base for war operations in Afghanistan, in return for brand new planes from Uzbekistan Airlines! Tashkent did not appreciate that the United States criticized the Andijan massacre, and especially that the UN transferred insurgents who had taken refuge in Kyrgyzstan to Romania, with the help of American bases in Central Asia. Islam Karimov's reaction, fearing that Washington would encourage regime change in his country, was not long in coming. The Shanghai group, bringing together China, Russia and four Central Asian countries, called two months later for the withdrawal of American bases in the region. At the end of July 2005, Tashkent informed the American embassy that the United States had 6 months to evacuate the Khanabad base in the south of the country. The Americans left the Uzbek base in November 2005, and managed to keep a base in Kyrgyzstan against the backdrop of their control of Central Asian oil. The region could live peacefully, if the presence of hydrofuels in colossal quantities had not thrown it into the geopolitical game of the great powers.

It’s difficult to take stock of this trip to Uzbekistan. A country whose architectural richness and the biblical hospitality of its inhabitants would almost make one forget the dictatorship of the Karimovs, and the international geostrategic issue in which the entire region is immersed... The young naked Uzbek in the VIP square finishes her dance stuck against the GI who smiles with all his teeth. The young woman takes her dollars and comes towards me. I signal to her that I have my turn, finish my “Baltika”, and return to the hotel to finish his bag.

EPILOGUE: Islam KARIMOV died in 2016. His death marks the end of an era in Uzbekistan. Under his regime which lasted 27 years, rights and freedoms were far from being respected: all dissent was violently repressed, and torture and arbitrary detentions became the hallmark of the judicial system. Hundreds of people died in the Andijan massacre, for which no one was held accountable. Thousands of citizens have ended up behind bars after unfair trials.

It was Shavkat Miromonovich, who succeeded Islam Karimov as president of Uzbekistan on September 8, 2016, after having been Prime Minister from December 11, 2003 to December 14, 2016.

During his mandate, and still in office, Mr. Mirziyoyev launched a series of political, economic and social reforms. For example, child labor and forced labor in the cotton industry were banned, ending a widespread practice in the country.

By 2023, Mirziyoyev's reforms aim to make Uzbekistan an open economy attracting foreign business and investment to Uzbekistan. Mirziyoyev's priorities include the fight against corruption and bureaucracy, as well as the elimination of trade barriers... To be continued...

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