One Night at the True Castle of Dracula. Between myth and reality. (Romania - 1992)

English translation at the end of the article.

Le Château de Bran, Faux Château de Dracula ; Vlad Dracul, Personnage Historique ; Monastère de Bucovine ; Mineur des Carpathes ; La Citadelle de Poenari, véritable Château de Dracula.  - Bran Castle, Dracula's False Castle; Vlad Dracul, Historical Figure; Bukovina Monastery; Miner of the Carpathians; The Citadel of Poenari, a real Dracula Castle.

Le Château de Bran, Faux Château de Dracula ; Vlad Dracul, Personnage Historique ; Monastère de Bucovine ; Mineur des Carpathes ; La Citadelle de Poenari, véritable Château de Dracula. - Bran Castle, Dracula's False Castle; Vlad Dracul, Historical Figure; Bukovina Monastery; Miner of the Carpathians; The Citadel of Poenari, a real Dracula Castle.

Dressées sur un piton rocheux à 400 mètres au-dessus de nos têtes, les ruines du château de Vlad Tepes dominent les gorges formidablement encaissées de la rivière Argès, au cœur de la Valachie Roumaine. Nous arrivons enfin au pays de Dracula... 

Le Château de Bran, le Faux Château de Dracula. - Bran Castle, Dracula's False Castle.

Le Château de Bran, le Faux Château de Dracula. - Bran Castle, Dracula's False Castle.

Le Château de Bran, le Faux Château de Dracula. - Bran Castle, Dracula's False Castle.

Le Château de Bran, le Faux Château de Dracula. - Bran Castle, Dracula's False Castle.

J'avais douze ans lorsque je suis tombé amoureux du film de Roman Polanski, "Le Bal des Vampires". Je suis resté fasciné par ces paysages mystérieux de moyennes montagnes d'où émergent des châteaux envoûtants au cœur d'une forêt dense et mystérieuse. J’ai toujours rêvé de me retrouver un jour ici, au fin fond des Carpates. Et C’est autour d’une bière avec mon meilleur ami Nicolas que s’est concrétisé le projet de passer une nuit dans le véritable Château de Dracula... 

Le Château de Bran, le Faux Château de Dracula et ses passages secrets. -Bran Castle, Dracula's False Castle and its secret passages.

Le Château de Bran, le Faux Château de Dracula et ses passages secrets. -Bran Castle, Dracula's False Castle and its secret passages.

Le Château de Bran, le Faux Château de Dracula. - Bran Castle, Dracula's False Castle.

Le Château de Bran, le Faux Château de Dracula. - Bran Castle, Dracula's False Castle.

L'atmosphère du village d’Arefu, au pied des ruines du château, nous ramène cinq siècles en arrière. Nicolas scrute la forteresse aux jumelles tandis que je vais me renseigner auprès d’un groupe de villageois sur le moyen d'y accéder. Les uns sourient, les autres me dévisagent d'un air tragique en hochant du chef: "Nu e possible!" ("C'est impossible!") me répondent-ils invariablement.

Les paysans solides et trapus du village sont tous coiffés de la traditionnelle "caciola", et portent un épais gilet de peau de mouton. Les femmes restent timidement en arrière. Ces robustes roumains sont les dignes descendants des hommes de guerre qui combattirent l'envahisseur turc sous les ordres des Voevods, seigneurs de la guerre, pour « sauvegarder la liberté et la dignité que procure la possession de la terre ». Cette dignité, les paysans d'ici l'ont conservée en vivant en autarcie au milieu des Carpates, luttant sans cesse contre la rudesse des montagnes, loin du joug des Ceaucescu et des gouvernements qui leurs ont succédé.

Première nuit à Brasov passée dans un chantier, faute d'hôtel... - First night in Brasov spent in a construction site, due to lack of a hotel...

Première nuit à Brasov passée dans un chantier, faute d'hôtel... - First night in Brasov spent in a construction site, due to lack of a hotel...

Le Marché de Brasov.

Le Marché de Brasov.

Les paysans sont bruns à la peau mate ou blonds aux yeux bleus, sans type particulier. En Roumanie, pays latin parmi les pays slaves, il est difficile de se réclamer roumain de pure souche. Ce pays, où Rome a envoyé au Moyen Age une avant-garde de seigneurs de la guerre et de guerriers pour enrayer l'expansionnisme musulman, essuya pendant des siècles des vagues successives d'invasions turques, slaves et autres... L’un des paysans au visage buriné m’indique un chemin dans la montagne en arborant un sourire radieux. Je suis son premier touriste. Il me tend une chaleureuse poignée de main où il ne reste que trois doigts…

Brasov, la queue devant un dépôt de pain. - Brasov, the queue in front of a bread store.

Brasov, la queue devant un dépôt de pain. - Brasov, the queue in front of a bread store.

Cabines téléphoniques à Brasov. - Telephone booths in Brasov.

Cabines téléphoniques à Brasov. - Telephone booths in Brasov.

« Alors, tu sais comment accéder au château ? ». « Un des paysans m’a indiqué un chemin. Il va falloir avancer à coup de serpe et escalader une partie ! ». « Mieux vaut se dépêcher si l’on veut y arriver avant la nuit ».

Nicolas s’en va faire le plein d’eau à un des nombreux puits qui ornent la rue. Une vielle tasse rouillée est fixée au bout d'une chaîne clouée sur les montants du puits. Du temps de Dracula, une coupe en or était simplement posée sur les bords de chaque puits à l'usage des passants. C’est toute l’ambiguïté du Prince Valaque qui voulait permettre à tous, même au plus pauvre, de pouvoir se désaltérer dans une coupe en or. Tandis que son joug sur ses terres à l'époque était tel, que personne n’aurait osé voler une de ces fameuses coupes !... 

Dans les rues de Câmpulung. - In the streets of Câmpulung.

Dans les rues de Câmpulung. - In the streets of Câmpulung.

Dans les rues de Câmpulung. -In the streets of Câmpulung.

Dans les rues de Câmpulung. -In the streets of Câmpulung.

Je pose mon sac et m'assois sur le bord du chemin en attendant Nicolas. Le ciel est menaçant. Un chien loup s'approche et se couche juste derrière moi. Je caresse doucement l'animal et me rappelle la première fois que j’ai poussé la porte de l'office du tourisme roumain deux mois plus tôt à Paris. A peine demandai-je des renseignements sur la Transylvanie que l'hôtesse me présentait une photo du château de Bran au dos d'une vieille brochure jaunie, en le désignant comme étant le château de Dracula. La jeune femme revint vite sur ses positions lorsqu'elle s'aperçut que j’en connaissais autant, voire plus qu’elle sur le sujet... Les Autorités roumaines sont conscientes du bénéfice à tirer du mythe de Dracula. Cependant, créer une infrastructure touristique autour du village d'Arefu, là où se dressent les ruines du véritable château de Dracula, aurait coûté trop cher. C'est pourquoi le tourisme roumain a choisi le château de Bran pour rentabiliser l'engouement que suscite le héros de Stoker...

Sur la route de Câmpulung à Curtea de Arges, en chemin pour le Véritable Château de Dracula. - On the road from Câmpulung to Curtea de Arges, on the way to the Real Dracula Castle.

Sur la route de Câmpulung à Curtea de Arges, en chemin pour le Véritable Château de Dracula. - On the road from Câmpulung to Curtea de Arges, on the way to the Real Dracula Castle.

En parfait état et situé dans un endroit beaucoup plus pittoresque où réside l'âme historique de la Roumanie, le Château de Bran attire bon nombre de touristes venant le visiter en quête de sensations. Le stratagème fonctionne si bien que tous les journalistes qui viennent en Roumanie pour écrire sur Dracula, repartent avec des photos du château de Bran pour illustrer leur article. Nous apprenons que des américains font le voyage par cars entiers en Europe, uniquement pour le photographier. Apres avoir parcouru la moitié du globe, une soixantaine de kilomètres sépare ces malheureux touristes du véritable but de leur voyage...

Sur la route de Câmpulung à Curtea de Arges, en chemin pour le Véritable Château de Dracula. - On the road from Câmpulung to Curtea de Arges, on the way to the Real Dracula Castle.

Sur la route de Câmpulung à Curtea de Arges, en chemin pour le Véritable Château de Dracula. - On the road from Câmpulung to Curtea de Arges, on the way to the Real Dracula Castle.

Sur la route de Câmpulung à Curtea de Arges, en chemin pour le Véritable Château de Dracula. - On the road from Câmpulung to Curtea de Arges, on the way to the Real Dracula Castle.

Sur la route de Câmpulung à Curtea de Arges, en chemin pour le Véritable Château de Dracula. - On the road from Câmpulung to Curtea de Arges, on the way to the Real Dracula Castle.

Au Château de Bran, je me suis fait aborder dans la cour par un canadien étonné de croiser deux français. Le canadien, écrivain de science-fiction, avait fait le voyage jusqu'à Bran pour trouver de l'inspiration. Je devinai facilement ce qui l’avait amené là et ne pus m'empêcher de lui conter la véritable histoire de Vlad Dracula, Prince de Valachie. Le canadien fut assez déçu lorsque je lui appris que le château de Bran n'était pas plus le nôtre que celui de Dracula. Le "Castel Bran", comme on l’appelle ici, fut construit au XIIIème siècle par le chevalier teutonique Dietrich. Et il ne vît la présence de Vlad Tepes qu'une fois tout au plus, et en tant qu'invité de surcroît…

Vlad Dracula, surnommé Vlad Tepes (Vlad l'Empaleur), Authentique Prince de Valachie. - Vlad Dracula, nicknamed Vlad Tepes (Vlad the Impaler), Authentic Prince of Wallachia.

Vlad Dracula, surnommé Vlad Tepes (Vlad l'Empaleur), Authentique Prince de Valachie. - Vlad Dracula, nicknamed Vlad Tepes (Vlad the Impaler), Authentic Prince of Wallachia.

Avant d’endosser le rôle sinistre du "Comte Dracula, Prince des Vampires", Vlad Dracula, ou Vlad Tepes est à l’origine un authentique prince de Roumanie, qui gouverna la Valachie d'une main de fer au XVème siècle. Fils de Vlad Dracul (Vlad "le diable"), Vlad Dracula était Voevod de Valachie, une province de Roumanie au Sud de la Transylvanie. Les Voevods étaient des princes et seigneurs de la guerre qui constituaient l'avant-garde de Rome face à l'expansionnisme turque. Dracula marqua l'histoire sous le nom de Vlad Tepes (prononcer tsepesch) dit Vlad l'Empaleur. Bien qu'il n'ait pas inauguré le supplice du pal, on lui attribua ce surnom pour avoir mis une sorte de génie infernal à perfectionner cette torture. Il employait des pieux dont on avait pris soin d'arrondir la pointe. La victime était empalée par un endroit différent selon son rang, son âge et son sexe. Et ce, le plus soigneusement possible pour ne pas gâcher le plaisir de Dracula à assister à l'agonie de l'être gigotant au sommet du pieu planté dans la terre. Il fît empaler, décapiter, dépecer, mutiler, brûler et bouillir vivant des hommes et des femmes par dizaines de milliers lors de ses campagnes hors de Valachie. Il faisait manger aux enfants les seins coupés de leur mère, farcis de leurs entrailles. Sa réputation de fou sanguinaire fut transmise aux quatre coins de l'Europe par les rares qui aient pu échapper à ses exécutions en masse. Les anecdotes foisonnent à son sujet. Il empale sur un coup de tête et épargne pour un bon mot, démontrant son manque total de respect envers la vie humaine. Au-delà de cet aspect “sadiquo-dément” de sa personnalité, Dracula était un génie militaire qui gagna une grande notoriété de ses campagnes contre l'armée du Sultan (l'empire Ottoman vient de prendre Constantinople et fait trembler le monde Occidental par sa puissance). Il déjoue et terrorise une armée turque 1000 fois supérieure en nombre à l'aide de stratégies modernes... De plus, à une époque où les Princes se succèdent, ramassant la couronne dans le sang pour la perdre avec la vie, Vlad Tepes se révèle être un homme d'état nationaliste implacable et sans pitié, qui tente de créer une nation dans un environnement en pleine anarchie. Personnage énigmatique, le Voevod Valaque fut à la fois chanté par son peuple comme héros de guerre repoussant l'envahisseur, considéré comme un boucher sadique par les allemands et les russes, et comme un ennemi implacable et sanguinaire par les turcs. Après sa mort, sa sinistre notoriété fut perpétrée par ses ennemis qui, dégustant leur vengeance, le diffamèrent pendant des siècles. Cette réputation arriva jusqu'aux oreilles de l'écrivain Britanique d'origine Irlandaise, Bram Stoker, qui fit au XIXème siècle de ce personnage historique peu ordinaire, le célèbre Comte Dracula, Vampire qui allait devenir plus tard l'un des plus grands mythes de la littérature et du cinéma fantastique...

En  stop sur la seule Autoroute de Roumanie, 120 km entre Bucarest et Pitesti. - Hitchhiking on the only highway in Romania, 120 km between Bucharest and Pitesti.

En stop sur la seule Autoroute de Roumanie, 120 km entre Bucarest et Pitesti. - Hitchhiking on the only highway in Romania, 120 km between Bucharest and Pitesti.

En stop entre Bran et Curtea de Arges, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Hitchhike between Bran and Curtea de Arges, on the way to the Real Dracula Castle.

En stop entre Bran et Curtea de Arges, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Hitchhike between Bran and Curtea de Arges, on the way to the Real Dracula Castle.

Pour les paysans de la région qui ne connaissent pas le roman de Stoker, Vlad Tepes n'est pas un nosferat (vampire) mais un moroï (mort vivant). Ils pensent que le tremblement de terre qui détruisit le château d’Arefu en 1913 est son œuvre "et que ce jour-là, le Voevod dans un terrible sursaut, a tenté d'échapper à la malédiction éternelle que ses crimes font peser sur lui et qui l'empêche de reposer en paix... Le héros sans repos de Stoker hante toujours les lieux et le villageois chargé de les garder ne s'y aventure, après le coucher du soleil, qu'avec son vieux missel usé qui, affirme-t-il, écarte les esprits malins rôdant là-haut... Passer une nuit au château de Dracula est considéré comme un défi à la mort que les plus téméraires osent rarement relever. A Arefu, nous ne connaissons qu'un villageois dont on affirme qu'il est le seul à avoir survécu à cette épreuve..." (Propos recueillis dans l'excellent ouvrage des professeurs américain R.T McNally et roumain R.Florescu: A la recherche de Dracula). Et c’est là que nous passerons la nuit ce soir !

Monastères orthodoxes de Bucovine. - Orthodox monasteries of Bukovina.

Monastères orthodoxes de Bucovine. - Orthodox monasteries of Bukovina.

Monastères orthodoxes de Bucovine. - Orthodox monasteries of Bukovina.

Monastères orthodoxes de Bucovine. - Orthodox monasteries of Bukovina.

Le chien-loup derrière moi se met à grogner. Je me retourne inquiet et le vois à l'arrêt, fixant le château en aboyant. Nicolas regarde l'animal stupéfait et me jette un coup œil complice en souriant, « Je crois que la nuit là-haut va être spéciale! »... Nous remontons les bords de l'Arges. Le lit de la rivière a été bétonné et aménagé pour recevoir les différents débits du barrage quelques kilomètres en amont. Les paysans disent qu'il existait une grotte allant du château jusqu'aux bords de l'Arges. Selon eux, cette grotte qui permit à Dracula de s'échapper de son château assiégé par les turcs, a disparu sous les coulées de béton d’aménagement...

En stop entre Bran et Curtea de Arges, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Hitchhike between Bran and Curtea de Arges, on the way to the Real Dracula Castle.

En stop entre Bran et Curtea de Arges, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Hitchhike between Bran and Curtea de Arges, on the way to the Real Dracula Castle.

Nous commençons l’ascension et croisons comme prévu un petit escalier de pierre grimpant dans la forêt. Au bout d’une centaine de marches entre les arbres, l'escalier se sépare en deux. Nous prenons à droite, le passage de gauche étant barré par une pancarte indiquant "zone militaire interdite!"… Cela fait maintenant une bonne heure que nous gravissons « discrètement » marche après marche, le chemin tortueux qui doit nous mener au château, quand les ruines apparaissent enfin entre les arbres... Nous arrivons quelques minutes plus tard à une vieille passerelle dressée en guise de pont-levis au-dessus de 400 mètres de vide, toute droit sortie d’un film d’Indiana Jones. A quelques mètres de l'antre de Dracula, nous ne pouvons cacher notre satisfaction d'avoir atteint notre but. Nous nous sentons pousser des ailes, traversons rapidement la passerelle en prenant appui sur ce qu’il reste de lattes de bois, et faisons une rapide visite des lieux. C'est comme nous l'espérions! La vue du haut des remparts est vertigineuse. Nous couvrons toute la vallée du regard. La conception de ce château, à la fois difficile d'accès et excellent poste d'observation, démontre tout le génie militaire de Vlad Tepes. Les ruines ont visiblement été rénovées, mais les travaux semblent inachevés...

Queue devant les magasins de Bucarest. - Queue in front of stores in Bucharest.

Queue devant les magasins de Bucarest. - Queue in front of stores in Bucharest.

Nous nous activons à installer la tente bien à l'abri dans la cour du château, tandis qu'un corbeau géant campant au sommet du donjon nous surveille tel le gardien des lieux. L'oiseau nous regarde de côté, déploie ses ailes à l'envergure impressionnante, et prend son envol dans un extraordinaire bruit de battement d'air… Nicolas termine de monter la tente pendant que je m'occupe de la corvée de bois. Je dois en amasser suffisamment pour alimenter un feu qui devra brûler jusqu'au matin. « Nicolas, c'est toi qui siffle? », « Non?! ». Je me précipite à l'entrée des ruines. Un militaire s'est engagé sur la passerelle, « On a de la visite! ».

Chez l'habitant à Sibiu et de nombreuses péripéties... - Homestay in Sibiu and many adventures...

Chez l'habitant à Sibiu et de nombreuses péripéties... - Homestay in Sibiu and many adventures...

Je vais aux devants du soldat et le salue de la main. C'est un jeune roumain d'une vingtaine d'années. Le militaire est étonné de notre présence ici et me demande d’un ton menaçant si je ne suis pas un tzigane ( ?!). Les tziganes sont détestés depuis des siècles en Roumanie. Au temps où les superstitions allaient bon train, ils étaient même considérés comme les amis des nosferats (vampires), accusés de leur donner des renseignements sur leurs ennemis... Je suis marqué par la pauvreté de l’uniforme du jeune militaire. Ses chaussures aux semelles usées jusqu'à la corne, sont d'énormes chaussons en cuir sans lacets, qui se referment sur une grosse paire de chaussettes beige. Le jeune militaire est armé d'un fusil semi-automatique AKA 47. L’embout de son canon est abîmé. S'il lui venait l'idée de tirer sur quelqu'un, son fusil lui exploserait à la figure! Le jeune homme ne parle pas autre chose que le roumain et nous avons beaucoup de difficultés à nous comprendre. Il fait des tours de garde pour surveiller les alentours de l'installation électrique de l'autre côté de la montagne. Il confirme que nous sommes bien dans les ruines du château de Vlad Tepes. Nous lui donnons un paquet de café et quelques cigarettes américaines que nous avons emmenées pour offrir. Le soldat accepte que nous passions la nuit dans les ruines. Il rajuste son uniforme et "prend la pause" tandis que Nicolas nous prend en photo…

Entre Curtea de Arges et Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Between Curtea de Arges and Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Entre Curtea de Arges et Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Between Curtea de Arges and Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

La nuit enveloppe peu à peu les ruines de la Forteresse. Dans la cour du Château, le feu danse au rythme des courants d'air, et projette nos ombres contre les murs. Le vent a chassé les nuages et la pleine lune est au rendez-vous. A l'affût du moindre bruit aux alentours, le seul appel que nous entendons est celui de notre estomac. Et le repas est bien maigre ce soir. Quelques pommes de terre bouilles dans du potage et un peu de pain dur que nous avons pu trouver dans les rares magasins vides, ouverts seulement une heure par semaine dans cette province reculée de Roumanie !

En stop avec des Mineurs aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Hitchhiking with Miners around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

En stop avec des Mineurs aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Hitchhiking with Miners around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Nous sommes en 1992, trois ans après le renversement des Ceaucescu. Le pays est en pleine misère. Et les enfants abandonnés sillonnent les rues de Bucarest. Avant de venir en Roumanie, nous nous doutions de ce que nous allions y trouver. Nous savions qu'avec le projet de passer une nuit au véritable château de Dracula, nous ne serions pas en phase avec l'actualité d’un pays sortant d'une révolution. Et que les roumains au sein d'une nation à la recherche de sa propre identité, auraient certainement d'autres chats à fouetter que de se demander pour nous, s'il existe encore des vampires dans leurs cimetières...

En stop avec des Bûcherons aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Hitchhiking with Lumberjacks around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

En stop avec des Bûcherons aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Hitchhiking with Lumberjacks around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

En stop avec des Bûcherons aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Hitchhiking with Lumberjacks around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

En stop avec des Bûcherons aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Hitchhiking with Lumberjacks around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Que ce soit en stop, ou chez l’habitant, bien à l’abri des oreilles indiscrètes, les conversations avec les roumains « de la ville » finissent invariablement par un débat sur l'avant et l'après Ceausescu. Quand on interroge ces roumains « de la ville » sur ce qu'il reste des vampires dans la superstition populaire, ils répondent que « les nosferats (vampires) et les moroïs (morts vivants) n'existent plus. Ceaucescu les a tués en interdisant d'y croire. Mais peut-être y croit-on encore dans les petits villages isolés de montagne, qui ont échappé à la "folle" restructuration des campagnes ordonnée par Ceaucescu... Avant la dictature, la Roumanie avait le meilleur niveau de vie des pays de l'Est. Quand Ceaucescu a été au pouvoir, il a voulu faire de nous des robots, des machines à travailler pour lui, sans esprit d'initiative, comme les coréens ou les chinois. Il a rasé les villages, derniers bastions des coutumes, légendes et superstitions, pour nous reloger dans des HLM. Pour détruire notre personnalité, il a détruit notre histoire...".

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Trois ans plus tard, la chute tant espérée des Céaucescu laisse un goût amer de bon nombre de roumains que nous avons rencontrés : « Avant, nous savions où allait l'argent. Ceaucescu faisait construire des palais gigantesques et des chantiers démesurés. Aujourd'hui il y a toujours le même argent mais on ne sait plus où il va... Avant la révolution, le business était entre les mains d'un pôle d'hommes d'affaires. Après la mort de Ceaucescu, le business est resté entre les mêmes mains! ».

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

La chute des Ceaucescu n’est en effet pas aussi claire qu’elle en a l’air. En Décembre 89, le journal T.V. annonce sur les estimations de “l'agence Stass”, que les premières journées d'émeutes populaires contre la dictature des Ceausescu ont fait des dizaines de milliers de victimes! A la fin Décembre, le nouveau pouvoir en place donne le chiffre de 60 000 morts. En Janvier 90, on ne parlera plus que de 10 000 morts. Et les estimations les plus sérieuses décompteront au final 766 victimes ! A Timisoara, on signale des charniers remplis d'hommes et de femmes torturés et éviscérés par la Securitate. La télévision diffuse en boucle une séquence montrant une trentaine de cadavres sortis de la morgue couverts de cicatrices. Ce sont en fait des cicatrices d'autopsies mais qu'importe! Sur toutes les chaînes de télévision occidentales, une seule bataille fait rage, celle de l'amplification médiatique ! Alors que les présentateurs des journaux télévisés emportés par la spirale de la course à l'Audimat, annoncent le soulèvement du peuple roumain et fabriquent de l'information avec rien, les présidents Bush et Mitterrand exhortent publiquement M. Gorbatchev de ne pas intervenir pour enrayer la chute des Ceausescu et le retour de la Roumanie à la Démocratie. Et en effet, Mickael Gorbatchev ne lèvera pas le petit doigt contre la chute des Ceausescu car il en est l’instigateur !  Nous sommes à la fin de l'année 1989. En Roumanie, Ceausescu reste inflexible. Reçu le 3 Décembre à Moscou avec les autres chefs d'état du pacte de Varsovie, il insulte Gorbatchev à huis clos, jurant de faire obstacle à la Perestroïka et à la Glasnost... Trois semaines d'émeutes plus tard, sans que la centaine de milliers d'hommes de la Securitate n’intervienne, Ceausescu et sa femme sont sommairement exécutés la veille de Noël par l'armée roumaine, après un simulacre de procès. Sur l'ordre de qui? Du général Militaru formé dans les écoles militaires soviétiques, comme la plupart des officiers roumains de sa génération. Et du camarade Ion Iliescu, condisciple de Gorbatchev à l'institut de perfectionnement des cadres de Moscou!  Au lendemain de la chute des Ceausescu, le pasteur Tekes à l'origine des soulèvements de Timisoara dira en Janvier 90: "Les structures n'ont pas changé. Les fauves sont toujours parmi nous!"

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

« La bouffe est prête?  T'as pas oublié de mettre de l'ail dans le potage au moins ? ». « Tu penses bien! Je l’ai spécialement emmené pour l'occasion! ».

Du roman de Stoker aux films qui s'en suivirent, il a toujours été alloué à l'ail la capacité d’éloigner les vampires. Cette superstition vient du Moyen Age. A l’époque, les alchimistes faisaient systématiquement brûler de l'arsenic pendant leurs expériences, car le gaz aux propriétés corrosives qui en résultait, était réputé pour empêcher la matérialisation des esprits démoniaques. Or ces gaz ont une forte senteur aillée. Et c'est par rapprochement avec l'odeur que les paysans ont attribué cette vertu à l'ail de pouvoir de repousser les vampires...

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Villages aux alentours de Arefu, en route pour le Véritable Château de Dracula. - Villages around Arefu, on the way to the Real Dracula Castle.

Dégustant notre potage au coin du feu, je raconte quelques anecdotes à Nicolas sur la vie de Vlad l'Empaleur. A des ambassadeurs turcs venus le saluer sans ôter leur coiffe, Vlad Tepes leur fait clouer leurs turbans sur le crâne! Il y a aussi l'histoire de ce boyard (seigneur) qui, invité à la table de Dracula au milieu d'une forêt de cadavres empalés, se pince ostensiblement le nez. L'homme à l'odorat trop sensible finira empalé lui aussi, mais sur un pieu deux fois plus haut que les autres pour ne pas être dérangé par les odeurs!... Parmi les dizaines d'anecdotes qui ont traversé les siècles, la plus morbide est certainement celle qui concerne la construction du château dans lequel nous passons la nuit.

Dans les montagnes et forêts, à quelques kilomètres du Véritable Château de Dracula. - In the mountains and forests, a few kilometers from the Real Dracula Castle.

Dans les montagnes et forêts, à quelques kilomètres du Véritable Château de Dracula. - In the mountains and forests, a few kilometers from the Real Dracula Castle.

Quand Dracula, monté depuis peu sur le trône, apprend que des boyards de son royaume ont assassiné son père d'un coup de couteau, et ont enchaîné puis enterré vivant son frère aîné dont il a toujours admiré la bravoure, "Il jure de châtier si durement les boyards félons que l'on se souviendra jusqu'au jugement dernier de leurs crimes et de sa vengeance...". Rusé et plein de sens pratique, Vlad Tepes organise alors une immense fête à l'occasion du jour de Pâques, et y convie tous ses sujets. Chacun vient festoyer avec ses plus beaux habits, du boyard au simple paysan en passant par les représentants de l'église. A une grande table, enivrés par le vin, des Boyards arrogants s’amusent au dépend de Dracula de savoir lequel d’entre eux a survécu au plus grand nombre de Princes. Ils sont loin d’imaginer ce qui les attend... A la fin du banquet, les anciens digèrent lourdement, les jeunes dansent et les enfants jouent. Dracula contrairement à son habitude, ne danse pas. Il semble préoccupé et s’en va plusieurs fois converser avec le capitaine de ses gardes... Quand les ombres s'allongent à l'Est et que le soleil se couche, Vlad Tepes donne l'ordre à sa garde de capturer les 300 familles des boyards félons et de leurs proches. Il fait empaler sur-le-champ les plus vieux et les expose tout autour de la ville ! Dans les jours qui suivent, le prince valaque conduit hommes, femmes et enfants jusqu'à Arefu par une marche forcée de 80 km qui tue les plus faibles... Arrivés à destination, il fait besogner les survivants à la construction de son château durant des années jusqu'à ce que mort s'en suive... Par cette "rafle de Pâques", comme elle est appelée dans les chroniques Valaques, "Vlad Dracula a magistralement réussi la passe de trois: Il a tiré sa vengeance des boyards, brisé leur puissance, et leur a fait construire le nid d'aigle d'où il continuera de les dominer" (Tiré de l'excellent ouvrage: "A la recherche de Dracula").

Dans les montagnes et forêts, à quelques kilomètres du Véritable Château de Dracula. - In the mountains and forests, a few kilometers from the Real Dracula Castle.

Dans les montagnes et forêts, à quelques kilomètres du Véritable Château de Dracula. - In the mountains and forests, a few kilometers from the Real Dracula Castle.

Dans les montagnes et forêts, à quelques kilomètres du Véritable Château de Dracula. - In the mountains and forests, a few kilometers from the Real Dracula Castle.

Dans les montagnes et forêts, à quelques kilomètres du Véritable Château de Dracula. - In the mountains and forests, a few kilometers from the Real Dracula Castle.

Des hurlements de loups surgissant du plus profond de la nuit, mettent fin à nos discussions morbides. "Les loups n'attaquent jamais l'homme, sauf parfois à la sortie d'un hiver rigoureux!" nous a dit un étudiant roumain qui nous a pris en stop la veille. « Tu penses qu'on a assez de bois? » demande Nicolas. « Je crois, oui... ». Mais de nouveaux hurlements se font entendre au-dessus des gorges. « La nuit va être longue, il vaut mieux assurer! ». Nicolas nous confectionne une torche. Il fait fondre de la cire de bougies dans une gamelle et verse le tout sur un tee-shirt sale qu’il enroule autour d'un rondin de bois vert. Il ne reste plus qu'à l'enflammer. « A toi l'honneur ! ». Je plonge la torche improvisée dans le feu et nous partons faire le tour des ruines à la lueur des flammes... Dès que nous nous éloignons du campement, un sentiment étrange nous envahit. Le cadre des ruines surplombant les gorges de l'Arges sous la pleine lune est aussi envoûtant qu'oppressant. Il suffit de s'écarter du feu pour ressentir comme une présence autour de nous et nous sentir mal à l'aise...

La Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - Poenari Citadel, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

La Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - Poenari Citadel, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

La Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - Poenari Citadel, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

La Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - Poenari Citadel, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

Nous retournons au campement avec notre cargaison de bois. Les langues vont aller bon train demain matin au village, concernant les lueurs observées la veille au soir au château du Voevod ! Nicolas jette la torche dans le feu et nous reprenons la discussion là où nous l'avions laissée entre deux hurlement de loup.

La Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - Poenari Citadel, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

La Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - Poenari Citadel, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

Dans la cour de la Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - In the courtyard of the Citadel of Poenari, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

Dans la cour de la Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - In the courtyard of the Citadel of Poenari, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

"S'il n'y eut jamais une histoire garantie et prouvée, c'est celle des vampires. Rien n'y manque; rapports officiels, témoignages de personnes de qualité, de chirurgiens, de prêtres, de juges. L'évidence est complète!" Vous n'aurez aucun mal à être d'accord cette citation de Jean-Jacques Rousseau après avoir parcouru les innombrables documents historiques cités ci-dessus, que j’ai consultés pour certains d’entre eux à l’époque à la bibliothèque de Versailles... Au chapitre de la hantise des vivants à se préserver du retour des morts, on tirait encore au pistolet au XIXème siècle sur les cadavres douteux, lorsque ces derniers n'étaient pas carrément cloués au plancher de leur cercueil, ou encore écrasés par de "lourdes pierres de cadavres"... Le Vampire : Mort qui selon la superstition populaire sort du tombeau pour sucer le sang des vivants. La littérature en a fait un personnage de légende. Le 7ème Art en a fait un mythe... Mais quittons la légende pour nous plonger dans l'univers austère et bien réel celui-là, d'un village du XVIIIème siècle perdu au fin fond des Carpates. Cela fait deux nuits de suite que vous êtes réveillé en sursaut par les hurlements de votre voisin. Vous pensez qu'il est arraché de son sommeil par de simples cauchemars, mais lui vous certifie qu'un parent proche mort depuis quelques jours, cherche à le tuer, l'étranglant lorsqu'il commence à s'endormir. La fatigue marque de plus en plus son visage et après une nouvelle nuit d'horreur, il reste alité dans un état de faiblesse extrême. La nouvelle fait le tour du village. Les anciens qui ont déjà été témoins de ce type de phénomènes, vont au chevet du malade. Ils remarquent à la base de son cou une série de taches bleuâtres, ponctuées par deux stigmates sanguinolents. Des marques qu'ils connaissent bien ! La quatrième nuit est paisible mais le lendemain matin, votre voisin ne se réveillera pas ! Les jours suivants, ce sont les fils du voisin qui sont atteints des mêmes symptômes de langueurs et d'hallucinations. Mais le phénomène ne tarde pas s'étendre au-delà de l'enclos familial. Les langues se délient et les villageois grondent. Des rumeurs de "moroï" et de "nosferat" arrivent jusqu'aux oreilles de l'Empereur qui dépêche immédiatement sur place, ses officiers et ses juges les plus sceptiques. Il faut régler l'affaire au plus vite car au siècle des grands philosophes, ces "superstitions campagnardes" font désordre et dérangent la Cour.

La Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - Poenari Citadel, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

La Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - Poenari Citadel, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

La Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - Poenari Citadel, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

La Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - Poenari Citadel, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

Au village, les morts se succèdent devant des médecins impuissants à détecter la moindre contagion. Les officiers ne contiennent plus la population qui décide d'exhumer le corps du parent proche suspecté de vampirisme. Une fois la tombe ouverte, tous constatent avec stupéfaction que le corps de l'homme est intact et ne dégage aucune odeur. Son visage est celui d'un homme qui vient de rendre son dernier souffle et pourtant, cela fait déjà plusieurs mois qu'il est enterré là! Ses membres sont souples et sa peau a gardé son élasticité. Dans son linceul souillé de sang frais, il semble vous regarder alors que sa veuve jure l'avoir inhumé les yeux fermés. Les officiers déconcertés mais circonspects, font ouvrir les autres tombes du cimetière afin de tenter d'élucider le phénomène. Chaque exhumation s'accompagne du spectacle macabre d'un corps en état plus ou moins avancé de décomposition, que l'enterrement ait eu lieu une semaine ou six mois plus tôt. Mais fait nouveau extraordinaire: Seules les "victimes du vampire" présentent un parfait état de conservation! Les villageois préparent en hâte un bûcher. Et c'est devant des juges et des officiers désorientés, que le bourreau transperce le cœur et coupe la tête des nosferats, seule méthode pour tuer les vampires et arrêter les morts en cascade... Des histoires similaires à celles-ci se sont déroulées partout en Europe et ont été rapportées par de nombreux procès-verbaux. De fait, les Vampires existent-ils? Il appartient à chacun d'interpréter ces faits à sa convenance !

Une nuit dans la Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - A night in the Citadel of Poenari, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

Une nuit dans la Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - A night in the Citadel of Poenari, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

Une nuit dans la Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - A night in the Citadel of Poenari, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

Une nuit dans la Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - A night in the Citadel of Poenari, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

Nicolas fixe le feu en s'amusant à remuer pensif les braises avec son bout de bois. Au creux de cette nuit fraîche du mois d'Avril 1992, le temps s'écoule peu à peu et nous rapproche inexorablement de l'aurore. Nous nous sentons complètement envoûtés par l'ambiance sinistre qui règne dans les ruines, sans toutefois avoir peur. Même si nous ne faisons pas les malins dès lors que nous nous éloignons du feu, la tendance est plutôt à la rigolade. D'autant que nous avons sérieusement attaqué une fiole de gnôle savoyarde que Nicolas a spécialement emmené pour l'occasion... "Et alors, c'est tout? Il n'est rien arrivé d'extraordinaire au château?". Pas tout à fait. Tout au long de la soirée et de la nuit se sont produits d'étranges phénomènes. Avec Nicolas, nous parlons encore aujourd'hui de ces avertissements sans frais sur le ton de la plaisanterie, faute de savoir qu'en penser! Je pourrais bien sûr décrire en détail tout ce qui s'est passé mais j'ai peur d'entrer dans de vaines polémiques à tenter de vous convaincre de choses qu'il faut nécessairement avoir vécues pour les croire... Et puis j'aimerai aussi garder une part de mystère pour ne pas rompre le charme de votre imagination, et vous inciter à vous offrir aussi un jour, votre nuit dans le château de Dracula...

Une nuit dans la Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - A night in the Citadel of Poenari, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

Une nuit dans la Citadelle de Poenari, près de Arefu, le Véritable Château de Dracula. - A night in the Citadel of Poenari, near Arefu, the Real Castle of Dracula.

EPILOGUE :

J’ai récemment eu l’occasion de retourner en Roumanie dans le cadre du travail. Bucarest s’est sans surprise fortement développée et est devenu une vrai capitale Européenne. Des PME d’une modernité rare et dont nous ferions mieux de nous inspirer, sont nées dans tout le pays et dans tous les secteurs d’activités en s’appuyant directement sur les dernières technologies disponibles. C’est un phénomène que j’ai souvent observé dans les pays en voie de développement. En revanche, il suffit de sortir de quelques kilomètres de Bucarest pour constater que le fossé qui sépare « la Ville » de « la Campagne » s’est amplifié.

Du côté des « Mythes et Légendes », le Château de Bran reste « l’attrape touriste » en quête de sensation. Mais pour les amateurs avertis, la Cité de Poenari est de plus en plus reconnue comme étant le véritable château de Dracula. En témoignent les engins de torture et surtout les Mannequins empalés à la mode de Vlad Tepes, qui ont pris place le long du millier de marches qui mène à la forteresse…

A l’époque, j’ai écrit un livre sur ce voyage initiatique en Roumanie en 1992. J’ai toujours le petit mot que m’a griffonné le célèbre Frison Roche, pour m’aider à me faire éditer. Je me rappelle que ce qui m’a de loin le plus marqué lors de ce voyage, et qui a continué de me hanter toutes ces années, ce sont les enfants abandonnés de Roumanie…

Les enfants abandonnés de Ceaucescu, à la Gara de Norte... - The abandoned children of Ceaucescu, at Gara de Norte...

Les enfants abandonnés de Ceaucescu, à la Gara de Norte... - The abandoned children of Ceaucescu, at Gara de Norte...

Je me souviens des enfants de la Gara de Norte, âgés de six ans tout au plus, coiffés de leur bonnet à pompon et emmitouflés dans de vieux anoraks, arpentant les voies à la recherche de leur dîner du soir ou d'un peu d'argent. Au milieu de la bande, une petite fille marchait dans une paire de bottes en caoutchoucs trop grandes pour elle. Ses longs cheveux blonds couleur "Or" dépassaient de son bonnet...

Je me souviens dans le train, le cortège continu d'enfants dans un état pitoyable, mendiant pour manger. Certains marchant sur une seule jambe pendant que d'autres rampaient à même le sol. Avec parmi eux, « des gueules noires », ces enfants des pays miniers dont la peau étaient marquée à vie par des taches indélébiles de poussière de charbon...

Je me souviens dans les rues de Bucarest, les gamins d’une dizaine d’années s’amusant à se fouetter en groupe à coup de bâtons avec acharnement. Et quand je leur demande d’arrêter, de me proposer de "visiter" Bucarest pour un dollar, avec des "passages obligés" par les meilleurs coins pour la drogue et les filles…

Et je me souviens du soir, dans « le restaurant » du voyage pour clôturer quelques semaines de disette, que l’on me tire délicatement la manche. C'est un enfant en loques de 6 ans à peine que le maître d'hôtel a dû "humainement" laisser entrer. Le gamin me fixe avec son grand regard plaintif. Je me rappelle que je ne sais pas quoi faire. Ne voulant pas participer à un système qui transforme les enfants en mendiants, je m'étais juré de ne jamais donner d'argent. La belle affaire! Je mets alors la main à la poche et lui donne ce que j'ai de billets. Mais le petit garçon reste sur place ?! Ce n'est pas ce qu'il attendait. Je lui fais signe que je n'ai rien d'autre? Et il montre alors du doigt l'orange que la serveuse vient d'apporter. Je la lui donne. Elle a l'air énorme dans ses petites mains potelées. Il dit merci et se sauve en courant. Il est 23h00, l'enfant va retourner dans la rue...

"Il y a 30 ans, peu après la chute de la dictature communiste de Ceausescu en Roumanie, l'Occident découvrait avec horreur la réalité de ses orphelinats de masse. Des enfants décharnés, hagards, vivant dans des conditions effroyables. Au total, ils furent près de 100 000 à s’y entasser." 

Des orphelins victimes de la politique ultra-nataliste de Ceausescu mise en place dès la fin des années 60. Le dictateur roumain veut que son pays ait un poids international, indépendamment de son statut de pays satellite de l’URSS. Pour atteindre son objectif, il a besoin d’une nation jeune. Par le décret 770 datant de 1966, il interdit l’interruption de grossesse sauf aux femmes ayant déjà eu au moins quatre enfants.

Le taux de natalité monte en flèche mais beaucoup de familles sont trop pauvres pour élever leurs enfants. Qu’à cela ne tienne, Ceausescu déclare que l’état peut se substituer aux parents. Les institutions pour enfants bourgeonnent aux quatre coins du pays. L’abandon se systématise et les orphelinats se remplissent. Les enfants sont « triés » en fonction de leur âge et de leurs facultés mentales. Un système de classification du handicap est même mis en place. Certains finissent dans de véritables mouroirs dont on découvrira l’existence quelques semaines après la chute du dictateur roumain en décembre 1989.

En 2020, il y a toujours de nouveaux enfants abandonnés dans les rues, victimes de l’odieux héritage tenace de la culture du communisme à la mode des Ceausescu... Je vous propose au travers d’un reportage porteur d’espoir, d’aller à la rencontre de ces nouveaux enfants abandonnés, et de découvrir ce que sont devenus ceux de l’époque des Ceausescu. Attention, certaines images peuvent choquer :

ONE NIGHT AT THE TRUE CASTLE OF DRACULA. BETWEEN MYTH AND REALITY. (ROMANIA - 1992)

On a rocky peak 400 meters above our heads, the ruins of Vlad Tepes castle dominate the formidably deep gorges of the Argès river, in the heart of Romanian Wallachia. We finally arrive in the land of Dracula ...

I was twelve when I fell in love with Roman Polanski's film, "Le Bal des Vampires". I was fascinated by these mysterious landscapes of medium mountains from which emerge bewitching castles in the heart of a dense and mysterious forest. And I have always dreamed of finding myself one day here, in the depths of the Carpathians.

It was around a beer with my best friend Nicolas that the project of spending a night in the real Dracula Castle came true ... The atmosphere of the village of Arrefu, at the foot of the ruins of the castle, we goes back 5 centuries. Nicolas photographs the fortress as I go to a group of villagers to find out how to get there. Some smile, others stare at me tragically, nodding: "Nu e possible!" ("It's impossible!") I am invariably answered.

The strong and stocky peasants of the village all wear the traditional "caciola", and wear a thick sheepskin waistcoat. Women are more timidly behind. These robust Romanians are the worthy descendants of the men of war who fought the Turkish invader under the orders of the Voevods, lords of the war, to safeguard the freedom and the dignity which the possession of the land brings. This dignity, the peasants here preserved it by living in “pseudo” autarky in the middle of the Carpathians, fighting unceasingly against the harshness of the mountains, far from the yoke of Ceaucescu and the governors which succeeded them.

The peasants are brown with dark skin or blond with blue eyes, without any particular type. In Romania, a Latin country among the Slavic countries, it is difficult to claim to be Romanian of pure stock. This country, where Rome sent in the Middle Ages a vanguard of warlords, the Voevods, and warriors to stop Muslim expansionism, suffered for centuries successive waves of Turkish, Slavic and other invasions ... One of the peasants shows me a path in the mountain with a radiant smile. I am his first tourist. He hands me a warm handshake with only three fingers left ...

 "So, do you know how to get to the castle?" Nicolas asks. “One of the peasants showed me a way. According to his facial expressions, he'll have to go forward with a billhook and climb a part! Better hurry if you want to get there before dark. "

"Time to fill up on the gourds and let's go! ". Nicolas goes to fill up with water at one of the many wells that adorn the street. An old rusty cup is attached to the end of a chain nailed to the uprights of the well. In Dracula's time, a gold cup was simply placed on the edges of each well for the use of passers-by. The Wallachian Prince's yoke on his land at the time was such that no one would have thought of stealing one of these famous cups! ...

I put my bag down and sit tired on the side of the road while waiting for Nicolas. The sky is threatening. A wolf dog slowly approaches and lies down just behind me. I gently stroke the animal and remember the first time I pushed open the door of the Romanian tourist office two months ago in Paris. No sooner had I asked for information about Transylvania when the hostess presented me with a photo of Bran Castle on the back of an old, faded brochure, pointing to it as Dracula's Castle. She quickly reconsidered her positions when she realized that I knew more than she did on the subject ... Indeed, the Romanian authorities are aware of the benefit to be drawn from the myth of Dracula. However, creating a tourist infrastructure around the village of Arrefu, where the ruins of Dracula's real castle stand, would have been too expensive. This is why Romanian tourism has chosen Bran Castle to monetize the enthusiasm aroused by the hero of Stoker ...

In perfect condition and located in a much more picturesque place where the historical soul of Romania resides, this castle attracts many tourists who come to visit it in search of sensations. The ploy works so well that all journalists who come to Romania to write about Dracula leave with photos of Bran Castle to illustrate their article. We learn that Americans are making the whole bus trip to Europe, only to photograph it. After having traveled half the globe, sixty kilometers separate these unfortunate tourists from the real purpose of their trip.

At the Château de Bran, a Canadian surprised to meet two Frenchmen approached us in the courtyard of the château. The Canadian sci-fi writer has traveled to Bran for inspiration. I easily guessed what had brought him to Bran and couldn't help but tell him the true story of Vlad Dracula, Prince of Wallachia. The Canadian is disappointed when I tell him that Bran's castle is no more mine than Dracula's. Built in the 13th century by the Teutonic knight Dietrich, the "Castel Bran" only saw the presence of Vlad Tepes once at most, and as a guest moreover ...

Vlad Dracula, authentic prince of Romania, ruled Wallachia with an iron fist in the 15th century, and 500 years later took on the more sinister role of "Count Dracula, Prince of Vampires": Son of Vlad Dracul (Vlad "the devil "), Vlad Dracula was Voevod of Wallachia, a province of Romania in southern Transylvania. The Voevods were princes and warlords who formed the vanguard of Rome in the face of Turkish expansionism. Dracula made history under the name of Vlad Tepes (pronounced tsepesch) said Vlad the Impaler. Although he did not inaugurate the torture of the pal, he was given this nickname for having put a kind of infernal genius to perfect this torture. He used stakes which had been taken care to round off the point. The victim was impaled by a different place depending on his rank, age and sex. And this, as carefully as possible so as not to spoil Dracula's pleasure in witnessing the agony of the being wriggling on top of the stake planted in the earth. He impaled, beheaded, butchered, mutilated, burned and boiled alive tens of thousands of men and women during his campaigns outside Wallachia. He made children eat their mother's cut breasts, stuffed with their entrails. His reputation as a bloodthirsty madman was transmitted to the four corners of Europe by the few who escaped his mass executions. Anecdotes abound about it. He impales on a whim and spares for a joke, demonstrating his utter disrespect for human life. Beyond this “sadico-demented” aspect of his personality, Dracula is a military genius gaining great notoriety for his campaigns against the Sultan's army (the Ottoman Empire has just taken Constantinople and is shaking the Western world by his power). He foils and terrorizes a Turkish army 1000 times greater in number using modern strategies ... Moreover, at a time when the Princes succeed one another, picking up the crown in blood only to lose it with life, Vlad Tepes is reveals a relentless and ruthless nationalist statesman, who tries to create a nation in an environment of anarchy. An enigmatic character, the Wallachian Voevod was both sung by its people as a war hero repelling the invader, considered a sadistic butcher by the Germans and Russians, and as an implacable and bloodthirsty enemy by the Turks. After his death, his sinister notoriety was perpetrated by his enemies who, tasting their vengeance, defamed him for centuries. This reputation reached the ears of the British writer of Irish descent Bram Stoker (XIXth century), who made of this unusual historical character, the famous Count Dracula, Vampire who was later to become one of the greatest myths of literature and fantastic cinema...

For the peasants of the region who do not know Stoker's novel, Vlad Tepes is not a nosferat (vampire) but a moroi (living dead). They think that the earthquake which destroyed the castle of Arrefu in 1913 is his work "and that that day, the Voevod in a terrible start, tried to escape the eternal curse that his crimes placed on him and which prevents him from resting in peace ... The restless hero of Stoker still haunts the place and the villager in charge of guarding them only ventures there, after sunset, with his old worn missal which, says he pushes aside the evil spirits prowling up there ... Spending a night at Dracula's castle is considered a challenge to death that the more reckless rarely dare to take up. In Arefu, we only know one villager whose it is said that he is the only one to have survived this ordeal ... "(Interview in the excellent work of American professors RT McNally and Romanian R.Florescu: In search of Dracula). And that's where we'll spend the night tonight!

The wolfdog behind me begins to growl. I turn around worried and see him standing still staring at the castle screaming death. Nicolas stunned, looks at the animal and gives me a knowing glance, smiling, "I think the night up there is going to be special!" »... We go up the banks of the Arges. The bed of the river was concreted and fitted out to accommodate the different flow rates of the dam a few kilometers upstream. The peasants say that there was a cave going from the castle to the banks of the Arges. This cave which allowed Dracula to escape from his castle besieged by the Turks, must have disappeared under concrete flows...

We begin the ascent and, as planned, cross a small stone staircase climbing into the forest. After about a hundred steps between the trees, the staircase splits in two. We take a right, the left passage being blocked by a sign indicating “prohibited military zone!”… We have now been climbing “discreetly” step by step for a good hour, the winding path which should lead us to the castle, when the ruins finally appear between the trees ... We arrive a few minutes later at an old footbridge erected as a drawbridge above 400 meters of vacuum. The ruined catwalk comes straight out of an Indiana Jones movie. "We must not linger too long in the open if we want to spend the night here quiet! ". " Be the first to! »Nicolas answers. We quickly cross the footbridge, leaning on the strongest wooden slats. A few meters from Dracula's lair, we cannot hide our satisfaction at having achieved our goal. We feel our wings growing, put down the bags and take a quick tour of the premises. It's as we hoped! The view from the top of the ramparts is breathtaking. We cover the whole valley with our eyes. The design of this castle, both difficult to access and an excellent observation post, demonstrates all the military genius of Vlad Tepes ... The ruins have obviously been renovated, but the work seems mysteriously unfinished...

We are busy setting up the tent well sheltered in the courtyard of the castle, while a giant and monstrous raven camping at the top of the dungeon watches us like the guardian of the place. The bird looks at us from the side, spreads its impressive wings, and takes off with an extraordinary sound of air flapping… Nicolas finishes setting up the tent while I take care of the wood chore. I must amass enough to fuel a fire that will have to burn until morning. "Nicolas, are you the one whistling?" ", " No?! ". I rush to the entrance to the ruins. A soldier stepped onto the bridge, “We have visitors! ".

 I go to the soldier's front and wave my hand. He is a young Romanian in his twenties. The soldier is amazed at our presence here and asks me if I am not a threatening (?!) Gypsy. Gypsies have been hated for centuries in Romania. At a time when superstitions were rife, they were even considered friends of nosferats (vampires), accused in particular of giving them information about their enemies. I show him my passport while Nicolad joins us with his camera ... I am marked by the poverty and the poor quality of the young soldier's uniform. His shoes, with their soles worn down to the horn, are enormous leather slippers without laces, which close over a large pair of gray-beige socks. The young soldier is armed with an AKA 47 semi-automatic rifle. The tip of his barrel is damaged. If he thought of shooting someone, his gun would explode in his face! The young man does not speak anything other than Romanian and we have great difficulty understanding each other. He makes guard tours to watch the surroundings of the electrical installation on the other side of the mountain and confirms that we are indeed in the ruins of Vlad Tepes' castle. We give him a packet of coffee and some American cigarettes which we took to offer. Well almost, because since we landed in Romania, Nicolas has started smoking again and regularly "consumes" our "offerings"! The soldier accepts that we spend the night in the ruins. He adjusts his uniform and "takes the break" while Nicolas frames us in his device...

The night gradually envelops the ruins in its curtain of darkness. In the castle courtyard, the fire dances to the rhythm of the air currents and casts our shadows on the walls. As we hoped, the winds have chased away the clouds and the full moon is here. On the lookout for any noise around, the only call we hear is our stomach. And the meal is very meager this evening. A few boiled potatoes in soup and a little raci bread that we could find in the few empty stores, open only one hour a day, but a week in this remote province of Romania!

We are in 1992, three years after the overthrow of the Ceaucescu. The country is in dire straits. Abandoned children roam the streets of Bucharest. Before coming to Romania, we suspected what we were going to find there. We knew that with the project of spending a night at the real Dracula's castle, we would not be too topical in a country emerging from a revolution. And that the Romanians within a nation in search of its own identity, would certainly have other fish to fry than to ask for us, if there are still vampires in their cemeteries ... stop, or at the inhabitant, well sheltered from the indiscreet ears, the conversations with the Romanians “of the city” invariably end a debate on the before and after Ceaucescu. When we ask these Romanians "from the city" about what remains of vampires in popular superstition, they answer that "nosferats (vampires) and moroïs (living dead) no longer exist. Ceaucescu killed them by forbidding them to believe in them. But perhaps we still believe in the small isolated mountain villages, which escaped the "crazy" restructuring of the countryside ordered by Ceaucescu ... Before, Romania had the best standard of living in Eastern Europe . When Ceaucescu was in power, he wanted to make us robots, machines to work for him, without a spirit of initiative, like the Koreans or the Chinese. He razed the villages, the last bastions of customs, legends and superstitions, to relocate us to low-cost housing. To destroy our personality, he destroyed our history ... ".

Three years later, the long-awaited fall of the Céaucescu left a bitter taste in the mouths of a good number of Romanians whom we met: "Before, we knew where the money was going. Ceaucescu had gigantic palaces and huge construction sites built. Today there is still the same money but we no longer know where it is going ... Before the revolution, business was in the hands of a cluster of businessmen. After Ceaucescu's death, business remained in the same hands ... The dictator is dead but the wolves remained! ".

In December 89, the newspaper T.V. announced on the estimates of the “Stass agency”, that the first days of riots against the Ceaucescu dictatorship made tens of thousands of victims! At the end of December, the new power in place gives the figure of 60,000 dead. In January 90, we are only talking about 10,000 deaths. The most serious estimates will finally count 766 victims! In Timisoara, mass graves are reported filled with men and women tortured and eviscerated by the Securitate. The television broadcasts a sequence showing around thirty corpses taken out of the morgue. The scars are from the autopsy, but who cares! On all Western television channels, only one battle is raging, that of media amplification! As newscaster swept away by the spiral of the ratings race, herald the uprising of the Romanian people and fabricate news out of nothing, Presidents Bush and Mitterand publicly urge Gorbachev not to intervene to stop the fall of the Ceaucescus and the return of Romania to Democracy. But what is it really? We are at the end of 1989. In Romania, Ceaucescu remains inflexible. Received on December 3 in Moscow with the other heads of state of the Warsaw Pact, he insults Gorbachev behind closed doors, swearing to obstruct Perestroika and Glasnost ... Three weeks of riots later, without the hundreds of thousands of Securitate men lifted a finger, Ceaucescu and his wife were summarily executed on Christmas Eve by the Romanian army, after a mock trial. On whose orders? From General Militaru trained in Soviet military schools, like most Romanian officers of his generation. And comrade Ion Iliescu, fellow student of Gorbachev at the Moscow Institute for Professional Development! The day after the fall of the Ceaucescu, Pastor Tekes at the origin of the uprisings in Timisoara will say in January 90: "The structures have not changed. The wild beasts are still among us!"

"Is the food ready?" You have enough time for three boiled potatoes! " Nicolas asks. “The fire was unusually difficult to catch. Strange, isn't it? ". “Don't piss off Yves! You don't scare me with your vampire stories. It's just bullshit! ... Didn't you forget to put garlic in the soup at least? ". "You think so! I took it especially for the occasion! ... From Stoker's novel to the films that followed, garlic has always kept vampires away. In the Middle Ages, alchemists systematically burned arsenic during their experiments, because the resulting gases with corrosive properties were known at the time to prevent the materialization of demonic spirits. However, these gases have a strong garlic scent. And it is by comparison with the smell that the peasants have attributed to garlic the power to repel vampires ...

Enjoying our soup quietly by the fire, I tell Nicolas some anecdotes about the life of Vlad the Impaler. To Turkish ambassadors who came to greet him without taking off their headdresses, Vlad Tepes had their turbans nailed to their heads! There is also the story of this boyar (lord) who, invited to Dracula's table in the middle of a forest of impaled corpses, ostensibly pinches his nose. The man with the overly sensitive smell will end up impaled too, but on a stake twice as high as the others so as not to be disturbed by the smells! ... It's horrible but still it makes a good laugh Nicolas ... Among the dozens of anecdotes that have crossed the centuries, the most morbid is certainly the one concerning the very construction of the castle in which we spend the night:

When Dracula, recently ascended to the throne, learns that boyars of his kingdom murdered his father with a stab, and chained and then buried his elder brother alive, whose bravery he always admired, "He swears to punish so harshly the felony boyars that we will remember until the last judgment of their crimes and his vengeance ... ". Cunning and practical, Vlad Tepes organizes a huge party on Easter Day and invites all his subjects to it. Everyone comes to feast in their best clothes, from boyar to simple peasant, including church representatives ... At the end of the banquet, the elders digest heavily, the young people dance and the children play. Dracula, unlike his habit, does not dance. He seems preoccupied and goes several times to converse with the captain of his guards ... When the shadows lengthen in the East and the sun sets, Vlad Tepes gives the order to his guard to capture the 300 families of felon boyars and their relatives. He impales the older ones on the spot and displays them all around town! In the days that follow, the Wallachian prince leads men, women and children to Arefu by a forced march of 80 km which kills the weakest ... When they reach their destination, he makes the survivors work on the construction of his castle during years until death follows ... By this "Easter roundup", as it is called in the Wallachian chronicles, "Vlad Dracula masterfully managed the pass of three: He took his revenge on the boyars , shattered their power, and made them build the eagle's nest from which he will continue to dominate them "(From the excellent book:"In Search of Dracula").

Wolf howls emerging from the depths of the night, end our morbid discussions and bring us back to harsh reality. "Wolves never attack humans, except sometimes at the end of a harsh winter!" a Romanian student told us who hitchhiked us the day before. "Do you think we have enough wood?" Nicolas asks. " I think so... ". But new howls are heard above the gorges. “The night is going to be long Yves, it is better to insure! ". Nicolas immediately makes us a torch. He melts candle wax in a mess tin and pours it onto a dirty T-shirt, wraps it around a green log. It only remains to ignite it. “The honor is yours, Yves! ". I immerse the improvised torch in the fire and we go around the ruins by the glow of the flames ... As soon as we move away from the camp, a strange feeling invades us. The setting of the ruins overlooking the gorges of the Arges under the full moon is as bewitching as it is oppressive. It is enough to move away from the fire to feel like a presence around us and to feel uncomfortable ...

We return to the camp once the stock of wood is replenished. The languages ​​will be booming tomorrow morning in the village, concerning the mysterious lights observed the night before at Voevod Castle! Nicolas throws the torch into the fire and we resume the discussion where we left off, so as not to have to listen to the distressing nighttime concert played especially for us this evening. In an atmosphere that lends itself admirably well (or badly depending on which side of the camera you are standing on!), We start to talk about vampirism.

"If there was ever a guaranteed and proven history, it is that of vampires. Nothing is missing; official reports, testimonies from quality people, surgeons, priests, judges. The evidence is complete! " You will have no trouble agreeing with Jean-Jacques Rousseau after having browsed the innumerable historical documents cited above, available in any good library that respects itself ... In terms of the obsession of the living to protect themselves from return of the dead, we still fired with pistols in the XIXth century on doubtful corpses, when the latter were not squarely nailed to the floor of their coffin, or even crushed by "heavy stones of corpses" ... The Vampire: Death who according to popular superstition comes out of the tomb to suck the blood of the living. Literature has made him a legendary figure. The 7th Art has made a myth of it ... But let's get out of the enchanted worlds and other imaginary countries to dive into the austere and very real world of an 18th century village lost in the depths of the Carpathians. It's been two nights in a row since you woke up with a start by your neighbor's screams. You think he is torn from his sleep by simple nightmares, but he assures you that a close relative who has been dead for a few days is trying to kill him, strangling him when he begins to fall asleep. Fatigue marks his face more and more and after another night of horror, he remains in bed in a state of extreme weakness. The news goes around the village. The elders who have already witnessed this type of phenomenon go to the bedside. They notice a series of bluish spots at the base of its neck, punctuated by two bloody stigmata. Brands they know well! The fourth night is peaceful but the next morning your neighbor will not wake up! The following days, it is the neighbor's sons who suffer from the same symptoms of languor and hallucinations. But the phenomenon does not take long to spread beyond the family enclosure. The tongues loosen and the villagers growl. Rumors of "moroi" and "nosferat" reached the ears of the Emperor who immediately dispatched his most skeptical officers and judges to the scene. The case must be settled as quickly as possible because in the century of the great philosophers, these "country superstitions" caused disorder and disturbed the Court.

In the village, the dead follow one another in front of doctors powerless to detect the slightest contagion. The officers no longer contain the population that decides to exhume the body of the close relative suspected of vampirism. Once the tomb is opened, everyone is amazed to see that the man's body is intact and does not emit any odor. His face is that of a man who has just breathed his last and yet he has been buried there for several months! Her limbs are supple and her skin has kept its elasticity. In his shroud stained with fresh blood, he seems to be watching you as his widow swears to have buried him with her eyes closed. The puzzled but cautious officers opened the other graves in the cemetery in an attempt to elucidate the phenomenon. Each exhumation is accompanied by the macabre spectacle of a body in a more or less advanced state of decomposition, whether the burial took place a week or six months earlier. But extraordinary news: Only the "victims of the vampire" present a perfect state of preservation! The villagers hastily prepare a pyre. And it is in front of disoriented judges and officers, that the executioner pierces the heart and cuts off the heads of nosferats, the only method to kill vampires and stop the cascading deaths ... Stories similar to these unfolded all over Europe and were reported in numerous minutes. Do Vampires Exist? It is up to everyone to interpret the facts as they see fit. As who would say, I do not believe in ghosts but I admit that they scare me!

Nicolas stares at the fire, having fun stirring the embers in thought with his piece of wood. In the midst of this cool night in April 1992, time gradually passes and brings us inexorably closer to dawn. We feel completely bewitched by the sinister atmosphere that reigns in the ruins, without being afraid. Even if we do not play smart when we move away from the fire, the tendency is rather to laugh. Especially since we seriously attacked a flask of Savoyard hooch that Nicolas took especially for the occasion ... "So, that's all? Nothing extraordinary happened at the castle?". Not quite. Throughout the evening and night, strange phenomena occurred. With Nicolas, we still talk today about these free warnings in the tone of the joke, for lack of knowing what to think! I could of course describe in detail everything that happened but I'm afraid to enter into futile controversies to try to convince you of things that you must necessarily have experienced to believe them ... And then I I would also like to keep a part of mystery so as not to break the spell of your imagination, and to encourage you to also offer yourself one day, your night in Dracula's castle...

EPILOGUE:

I recently had the opportunity to return to Romania for work. Bucharest has unsurprisingly developed strongly and has become a true European capital. SMEs of rare modernity and from which we would do better to take inspiration, have sprung up all over the country and in all sectors of activity, relying directly on the latest available technologies. This is a phenomenon that I have often observed in developing countries. On the other hand, one only has to leave Bucharest a few kilometers to see that the gulf that separates "the City" from "the Country" has widened.

As for "Myths and Legends", Bran Castle remains "tourist trap" in search of sensation. But for informed amateurs, the City of Poenari is increasingly recognized as being the true castle of Dracula. Witness the torture devices and especially the impaled mannequins in the fashion of Vlad Tepes, who took place along the thousand steps leading to the fortress...

At the time, I wrote a book about this initiatory trip to Romania in 1992. I still have the little note that the famous Frisian Roche scribbled for me, to help me get it edited. I remember that by far what struck me the most during this trip, and which has continued to haunt me all these years, are the abandoned children of Romania ...

I remember the children of La Gara de Norte, six years old or less, wearing their pompom caps and bundled up in old anoraks, walking the tracks in search of their evening dinner or a bit of silver. In the middle of the gang, a little girl was walking in a pair of rubber boots that were too big for her. Her long blond hair color "Gold" protruded from her cap ...

I remember on the train, the continuous procession of children in a pitiful state, begging for food. Some walked on one leg while others crawled on the floor. With among them, "black faces", these children of mining countries whose skin was marked for life by indelible stains of coal dust ...

I remember in the streets of Bucharest, ten-year-olds having fun whipping themselves in groups with sticks relentlessly. And when I ask them to stop, to suggest that I "visit" Bucharest for a dollar, with "must go" through the best places for drugs and girls ...

And I remember the evening, in the "restaurant" of the trip to close a few weeks of famine, being gently pulled by my sleeve. It is a ragged child of barely 6 years old that the butler had to "humanely" let in. The kid is staring at me with his big plaintive gaze. I remember I don't know what to do. Not wanting to participate in a system that turns children into beggars, I vowed to never give money. Big deal! I then put my hand in my pocket and give him what I have in tickets. But the little boy stays there ?! This is not what he expected. Do I let him know that I have nothing else? And he then points to the orange that the waitress has just brought. I give it to him. She looks huge in her chubby little hands. He says thank you and runs away. It is 11:00 p.m., the child is going back to the street ...

"Thirty years ago, shortly after the fall of the communist dictatorship of Ceausescu in Romania, the West discovered with horror the reality of its mass orphanages. Scrawny, haggard children living in appalling conditions. were nearly 100,000 crowded there. "

Orphans victims of Ceausescu's ultra-natalist policy implemented at the end of the 1960s. The Romanian dictator wants his country to have international weight, regardless of its status as a satellite country of the USSR. To achieve his goal, he needs a young nation. By Decree 770 dating from 1966, it prohibited the termination of pregnancy except for women who had already had at least four children.

The birth rate is skyrocketing but many families are too poor to raise their children. Never mind, Ceausescu says the state can substitute for parents. Children's institutions are sprouting up across the country. Abandonment is systematizing and orphanages are filling up. Children are "sorted" according to their age and mental faculties. A disability classification system is even put in place. Some end up in veritable dying places that will be discovered a few weeks after the fall of the Romanian dictator in December 1989.

In 2020, there are always new children abandoned in the streets, victims of the odious tenacious legacy of the culture of communism in the Ceausescu fashion ... I propose to you through a report bearing hope, '' meet these new abandoned children and find out what happened to those of the Ceausescu era. Be careful, some images may shock.

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