Les Mines Antipersonnel au Cambodge. Du légendaire AKI RA aux démineurs méconnus de la DU6 de la CMAC.
01 août 2021Antipersonnel Mines in Cambodia.
From the legendary AKI RA to the little-known deminers of CMAC DU6.
English translation at the end of the article.
« Qu’est ce que vous faites là ? »
L’homme de près de deux mètres qui m’interpelle dans un français et une tenue d’officier impeccables est Peter Willers, 73 ans, colonel de l'armée allemande à la retraite, à la tête de la DU6 de la CMAC. Je lui explique mon réel intérêt pour son action, et le Colonel me propose de nous entretenir après le « levé des couleurs » de 7h00.
Il est 6h55 du matin. Je me suis invité à Siem Reap au levé du soleil à la DU6 de la CMAC, la sixième division de déminage du Centre d’Action Anti Mines du Cambodge, une organisation gouvernementale en charge du déminage du pays.
6h50 au sein de la DU6. Préparation au lever des Couleurs. - 6:50 a.m. within DU6. Preparation for the raising of the Colors.
Victime de bombardements intensifs durant la guerre du Vietnam, miné par des guerres civiles pendant des décennies, le Cambodge figure au palmarès funeste des pays qui possèdent le plus d’engins explosifs en activité sur leur territoire.
La CMAC fait partie des quatre organisations principales travaillant au déminage du Cambodge. Les trois autres sont les « Forces armées royales cambodgiennes (ARC) », « Halo Trust », et le « Mines Advisory Group (MAG) ». Ces quatre organisation répondent à l’ACAM, l’Autorité Cambodgien Anti Mines, qui régule et coordonne toutes les activités de déminage dans le pays.
Moment de détente à « l’Angkor Village Resrot and Spa » ; Temples d'Angkor Vat - Moment of relaxation at the “Angkor Village Resort and Spa”; Angkor Wat temples
Nous nous sommes faits plaisir avec Isa et avons choisi un hôtel paradisiaque à la sortie de Siem Reap pour partir à la découverte des splendeurs d’Angkor Vat, « l’Angkor Village Resrot and Spa ». J’ai remarqué à deux pas de l’hôtel un panneau au carrefour indiquant l’unité DU6 de déminage Germano Cambodgienne à 400 mètres de là. Guidé par ma curiosité, je quitte Isa au bord de la Piscine de l’hôtel en fin d’après midi pour trouver la garnison de la DU6. Je trouve une caserne quasi déserte. Un jeune garde m’indique que l’unité est en mission et me conseille de revenir le lendemain matin au levé des couleurs pour être sûr de rencontrer un officier…
Prothèses de Mutilés par les Mines, des plus modernes aux plus archaïques ; Jeune homme de la région du lac Tonle Sap mutilé par une mine. - Prosthetics for those Mutilated by Mines, from the most modern to the most archaic; Young man from the Tonle Sap lake region mutilated by a mine.
Les mines sont une réalité du quotidien au Cambodge. Il y a dans le pays quelques 40 000 hommes, femmes et enfants amputés, l’un des taux les plus élevé au monde. Difficile en tant que voyageur de ne pas croiser de Cambodgiens de tout âge, rendu aveugle ou estropié par une mine antipersonnel. Difficile de ne pas rencontrer un cambodgien qui n’ait pas un proche, un membre de sa famille, touché par ce fléau. Bien qu’il diminue d’année en année grâce à l’action des organismes de déminage, le taux d'accidents au Cambodge reste également l’un des plus élevés au monde. Tant et si bien que marcher 10 mètres dans la jungle à l’écart des routes pour aller se soulager relève au Cambodge de l’inconscience. Vous entendrez souvent que « Mieux vaut se soulager le long de la route et perdre sa dignité plutôt qu’une jambe ! ».
La salle de réunion de la DU6 ; La collection de Mines Antipersonnel d'AKI RA. - The DU6 meeting room; The AKI RA Antipersonnel Mines collection.
Ce qui m’a conduit à pousser les grilles de la DU6, c’est un personnage de roman, AKI RA, dont nous « avons croisé la route » avec Isabelle, alors que nous revenions en touk-touk de Bentea Sré, un temple magnifique au nord d’Angkor Vat. Nous avons été arrêtés par la vue surréalistes d’obus de toutes tailles dressés sur le bord de la route pour signaler le fameux « Musée des Mines d’AKI RA ».
Bombes Russes et Américaines non explosées à l'entrée du Musée des Mines d'AKI RA. - Unexploded Russian and American bombs at the entrance to the AKI RA Mining Museum.
L’endroit est beaucoup plus qu’un simple musée. Les 3 US$ du ticket que l’on paye à une adorable militaire cambodgienne à l’entrée, permettent de financer un orphelinat derrière le musé, offrant un toit et une éducation à des dizaines d’enfants touchés par les mines terrestres à travers le pays. Un orphelinat qui a pour vocation de guérir les blessures du Corps mais aussi celles du Cœur et de l’Esprit de ces enfants recueillis par AKI RA.
Bombes Russes et Américaines non explosées à l'entrée du Musée des Mines d'AKI RA. - Unexploded Russian and American bombs at the entrance to the AKI RA Mining Museum.
La visite du Musée, fondé en 1997, ne laisse pas insensible. On y découvre la longue histoire des champs de mines au Cambodge, et les ravages tant physiques qu’économiques qu’ils continuent de causer auprès des populations. Une longue histoire de 35 ans de guerres sanglantes, racontée au travers la vie du fondateur du musé, AKI RA, un ex enfant soldat des Khmers Rouges.
Portraits du légendaire AKI RA, enfant Soldat enrôlé de force par Khmers Rouges, qui a consacré sa vie à déminer le pays des mines qu'il avait lui même posées enfant. - Portraits of the legendary AKI RA, a child soldier forcibly conscripted by the Khmer Rouge, who devoted his life to clearing the country of the mines he himself had laid as a child.
Les 3 US$ d'entrée au musée des mines d'Aki Ra finance un orphelinat pour les enfants victimes des mines. ; La collection de mines Antipersonnel d'AKI RA. - The US$3 entrance fee to the Aki Ra mining museum funds an orphanage for child victims of mines. ; AKI RA's collection of antipersonnel mines.
Aki Ra n'est pas sûr de son âge. Il pense être né en 1973, pendant la guerre du Viêt-Nam. Les forces Viêt-Cong utilisent à l’époque le Cambodge comme base arrière. Et l’armée américaine lance de manière non officielle, car non entérinée par le Congrès, jusqu’à 3 000 raids aériens sur le Cambodge pour déloger la guérilla ennemie. Un pilonnage intensif de 550.000 tonnes de bombes ! 3 ans plus tôt, le général Lon Nol, soutenu par les Etats Unis, a profité d’un voyage du roi pour prendre le pouvoir, et ordonner de miner massivement la frontière pour contenir les incursions des troupes communistes, et empêcher le soutien du Vietnam à la guérilla khmère rouge qui sévit dans le pays.
Figurines de soldats Khmers Rouges dans le musée des mines d'AKI RA. - Figurines of Khmer Rouge soldiers in the AKI RA mining museum.
En 1975, tandis que la guerre du Viêt-Nam se termine, Pol Pot et les Khmers Rouges rentrent dans Phnom-Penh et prennent le pouvoir. La guerre civile cesse mais « l’enfer des Khmers Rouges » commence pour la population cambodgienne. Les Khmers rouges mettent en œuvre la révolution prônée par Pol pot. Ils exécutent tout ce qui ressemble à un intellectuel. Le simple fait de porter des lunettes ou de savoir lire suffit à passer par les armes. Déportations en masse, enrôlement de force des jeunes dans l’armée, minage des terres agricoles, les Khmers Rouges mettent tout en œuvre pour supprimer les liens des cambodgiens à la famille et l’attachement à leurs terres. Le régime Khmer Rouge baigne dans une paranoïa maladive. Le Vietnam, ancien allié, devient ennemi, et les Khmers Rouges minent à nouveau avec frénésie la frontière avec le Viet Nam.
Figurines de soldats Khmers Rouges dans le musée des mines d'AKI RA. - Figurines of Khmer Rouge soldiers in the AKI RA mining museum.
Les parents d’AKI RA ont été tués par les Khmers Rouges. Devant la masse de cambodgiens tentant de fuir la révolution de Pol Pot et de se réfugier sur ses terres, le Viet Nam réagit et l’armée Viêt-Cong envahit le Cambodge pour renverser le régime des Khmers rouges. AKI RA, orphelin, 10 ans à peine, est enrôlés de force dans l’armée des Khmers Rouges sous peine de subir le même sort que ses parents. Il est envoyé dans la bataille contre l'invasion vietnamienne et est aussitôt capturé. Les vietnamiens lui donnent le choix à 10 ans, entre lutter contre les Khmers rouges dans l'armée Viêt-Cong, ou être tué comme partisan des Khmers. Il choisit naturellement la première option….
Cartes d'état major américaines indiquant la présence de mines au Cambodge.- American staff maps indicating the presence of mines in Cambodia.
La guérilla pose des mines « pour se défendre », l’armée vietnamienne fait de même. AKI RA comme d’autres enfants des deux camps, posent des mines « à tout va ». Les mines sont « l’arme du pauvre », bon marché, moins de 3$ la pièce, faciles à installer, diaboliquement efficaces, une arme à retardement qui peut encore tuer 150 ans après sa pose… Les mines s’imposent vite comme « l’arme de choix » par les deux parties.
La collection de mines désamorcées d'AKI RA ; Souvenirs d'AKI RA. - AKI RA's collection of defused mines; Memories of AKI RA.
L’armée Viêt-Cong renverse rapidement le régime de Pol Pot. Phnom Penh est libérée mais la guérilla khmère rouge persiste dans la jungle qui borde la Thaïlande. Toute la zone est aussitôt minée à un rythme effréné. C’est le projet du « mur de bambous ». Les provinces frontalières, composées de jungle dense, sont parsemées de mines et deviennent la région la plus dangereuse au monde.
De l'importance de déminer les terres des paysans cambodgiens pour leur permettre de survivre de leurs terres. - On the importance of clearing the land of Cambodian farmers to enable them to survive from their land.
Puis lorsque l’armée Vietnamienne quitte le Pays, AKI RA entre naturellement dans l'armée formée par le nouveau gouvernement du Cambodge. De là, fatigué d’être un cambodgien qui tue d’autres cambodgien, il prend pour la première fois les rennes de son destin. Il décide de consacrer sa vie à « réparer ses erreurs », et à employer toute son énergie pour déminer les millions de mines qu’il aura contribué à poser sur les terres de son propre pays.
Il faudra attendre 1998, et la reddition des derniers rebelles khmers rouges, pour entamer la véritable reconstruction du Cambodge. Mais le fait que les campagnes soient minées freine considérablement la relance économique du pays. Les mines restreignent l'accès aux terres agricoles, aux pâturages, aux forêts et aux ressources en eau. Elles frappent aveuglément les soldats, les civils et le bétail, de sorte qu’il est impossible de cultiver dans ces conditions.
Mines et obus non explosés au musée des mines d'AKI RA. - Mines and unexploded shells at the AKI RA Mining Museum.
AKI RA retourne d’abords dans les villages où il a lui-même posé des milliers de mines. Faute d’être équipé des d’outils adaptés, il désamorce les mines à la main, avec un bâton et un couteau. Il vend les mines et obus désamorcés à la ferraille pour aider à financer son travail. Il recueille de nombreux enfants blessés par des mines terrestres et les emmène à son domicile, où lui et sa femme les élèvent comme les leurs, aux côtés de leurs propres enfants. La renommée d’AKI RA se propage de bouches à oreilles dans les campagnes. Les touristes entendent parler de l’histoire d’un jeune homme Khmer qui démine le pays avec un bâton, et qui a une maison pleine de munitions désamorcée.
AKI RA commence à facturer un dollar pour voir sa collection, et utilise l'argent pour aider à poursuivre ses activités. Ainsi naissent « le Musée des mines d’AKI RA » et l’ONG Self Help déminage (CSHD), qu’il crée en 2008 pour répondre aux appels à l’aide toujours plus nombreux des chefs de villages pour déminer et sécuriser leurs terres… Telle est l’histoire de la légende Aki Ra, qui devrait prochainement être « portée à l’écran »…
7h00 du Matin. Levée des Couleur à la DU6 de la CMAC. - 7:00 a.m. Raising of Colors at DU6 of the CMAC.
7h00 du Matin. Levée des Couleur à la DU6 de la CMAC. - 7:00 a.m. Raising of Colors at DU6 of the CMAC.
Les Démineurs de la DU6 sont au garde à vous. Il est 7h00. La radio passe l’hymne du Cambodge. Deux soldats montent les couleurs… L’officier en second donne l’ordre de rompre les rangs, les hommes se saluent et plaisantent entre eux de m’avoir vu faire des photos de la montée des couleurs. Le Colonel Peter Willers me fait une rapide revue des troupes et des locaux, et m’emmène dans son bureau.
Peter Williers, Officier du Ministère des Affaires Etrangères allemand , en charge de la DU6 de la CMAC. - Peter Williers, Officer of the German Ministry of Foreign Affairs, in charge of DU6 of the CMAC.
Peter Willers a officié dans les transmissions, à Djibouti et en Tunisie. C'est là, entouré de militaires Français qu’il a parfait sa maîtrise de la langue française. Ses réseaux au ministère des affaires étrangères allemand l’ont conduit à accepter des missions de déminage dans différents pays, en Bosnie, à Sarajevo en 97, au Kosovo, et enfin au Tchad en 2001. Au Tchad, il travaillait avec des Paras français dont il me loue avec respect la qualité et l’efficacité (venant d’un allemand, le compliment est à déguster).Et pour justifier de n’être que 6 allemands pour 300 Paras français, Peter me raconte en souriant qu’il taquinait souvent les officiers français en leur disant que les allemands misent beaucoup plus sur la qualité que la quantité.
Peter Williers, Officier du Ministère des Affaires Etrangères allemand , en charge de la DU6 de la CMAC. - Peter Williers, Officer of the German Ministry of Foreign Affairs, in charge of DU6 of the CMAC.
Peter me montre le livre qu’il a écrit sur l’art du déminage. Un livre dans lequel il rend hommage à son adjoint mort au Tchad. Peter était sur Ndjamena pour rendre un rapport aux forces de l’ONU. Son adjoint s’est occupé seul d’enterrer 10 tonnes d’UXO, des « d’obus non exploses », tels qu’on les appelle. Les 10 tonnes ont explosé trop tôt. Et Peter me raconte qu’il aurait dû mourir lui aussi ce jour là, et comment l’on a retrouvé les jambes de son adjoint sur place et sa tête à 200 mètres de là…
Peter Williers me présente les résultats éloquents de la DU6 de la CMAC. - Peter Williers presents to me the eloquent results of DU6 of the CMAC.
Peter Williers me présente les résultats éloquents de la DU6 de la CMAC. - Peter Williers presents to me the eloquent results of DU6 of the CMAC.
Peter Willers me présente les résultats de la DU6. Depuis 5 ans qu’il en est à la tête, Peter tient son bilan et ses indices de productivité aussi finement qu’un chef d’entreprise du privé. Il contrôle le nombre de mines désamorces et d’UXO détruits, le coût moyen du désamorçage d’un mine, et les centaines de milliers de mètres carres que ses équipes et lui assainissent chaque années pour permettre aux paysans de travailler la terre en toute sécurité. Et il suit bien sûr, la baisse du nombre des victimes civiles des mines et des UXO, passé de 850 par an au début des années 2000 à 120 ces dernières années.
Champs de Mines et Faits d'Armes de la DU6 de la CMAC. - Minefields and Feats of Arms of DU6 of the CMAC.
Un démineur « pacifie » 75 a 100 m² par jour. En 2013, la DU6 a détruit 25 000 UXO désamorcé ou détruit 4 000 mines, et à permit aux paysans de retravailler en toutes sécurité sur 5 000 000 m² de terre déminées. Peter m’explique avec fierté que la courbe en forte baisse des accidentés par les mines est bien sûr le fuit du déminage, mais aussi de la sensibilisation des ses équipes dans les villages et les écoles auprès des jeunes enfants. Au Cambodge, un quart des accidentés des mines sont des enfants insouciant du danger, qui n’hésitent pas à braver les barbelés et les panneaux " danger mines" pour aller chercher un ballon égaré au milieu d’un terrain miné.
Les Hommes de la DU6 de la CMAC. D'anciens soldats l'Armée Cambodgienne. - The Men of the DU6 of the CMAC. Former Cambodian Army soldiers.
Les Hommes de la DU6 de la CMAC. D'anciens soldats l'Armée Cambodgienne. - The Men of the DU6 of the CMAC. Former Cambodian Army soldiers.
La CMAC Demining Unit 6 (DU 6), est née d’un accord entre le ministère allemand des affaires étrangères et le gouvernement du Cambodge en 1999, pour prendre en charge le déminage des provinces de Oddar Meanchey et Siem Reap. En termes de qualification, de sécurité et de résultat, la DU6 de la CMAC avec Peter Willers à sa tête, fait office de référence et est considérée comme l’une des meilleures unités de déminage au Cambodge. En signe de reconnaissance pour son action, Peter Willers a été décoré de la Royal Sahemetrei (Chevalier de la Légion d’Honneur) par Hor Namhong, Vice-Premier Ministre cambodgien et Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération.
Les Hommes de la DU6 de la CMAC en Action. Passage de la zone à déminer au coupe fil. - The Men of CMAC DU6 in Action. Passage of the area to be demined to the wire cutter.
Serpents, Mygales et Fourmis Rouges, difficile de trouver un peu de repos pour les hommes de la DU6 de la CMAC. - Snakes, Tarantulas and Red Ants, it's difficult to find a little rest for the men of DU6 of the CMAC.
La qualité de la DU6 repose sur son management, mais aussi sur la qualification des 305 hommes qui la composent, pour la majorité d’anciens militaires Cambodgiens. Fort de la formation continue qu’il leur prodigue, Peter est fier de ne déplorer aucun accident au sein de ses équipes depuis qu’il en a la charge. Il me montre comment ses unités opèrent. Des hommes lourdement protégés qui débroussaillent le terrain d’abords au bulldozer puis au coupe-fil. Puis viennent les démineurs avec leurs détecteurs plus ou moins sophistiqués, la « Gamelle » (minilab) pour les mines, et des détecteurs plus sensibles pour les UXO enfouies profondément dans le sol. Il me montre tous les types de mines rencontrées sur le terrain, les engins disséqués et les clés adéquates pour les désamorcer.
Peter Williers est appelé sur les lieu d'un drame. Un paysan a roulé sur une mine anti char. - Peter Williers is called to the scene of a tragedy. A farmer ran over an anti-tank mine.
Peter et ses hommes côtoient la mort de près. Il me montre les photos de trois agriculteurs morts récemment pour avoir roulé sur une mine anti char. Les mines anti chars, avec leur 5 kg d’explosifs sont les plus destructrices. Quand les hommes de Peter détectent une mine antichar, la consigne avant de la désamorcer avec les outils adéquats, est d’y accrocher un filin de 25 mètres et de tirer dessus ! Les khmers rouges avaient l’habitude de piéger les mines antichar en les posant sur une seconde mine amorcée par le poids de la première.
Destruction d'UXO (obus non explosés). La DU6 en a découvert plusieurs tonnes à moins de 500m des temples d'Angkor Vat en 2012. - Destruction of UXO (unexploded shells). DU6 discovered several tonnes less than 500m from the Angkor Wat temples in 2012.
La réduction des victimes des mines passe aussi par de la formation et de la prévention dans les écoles, par Peter Willier et ses hommes. - Reducing mine victims also requires training and prevention in schools, by Peter Willier and his men.
Je suis fasciné par les récits de Peter qui me ramènent 25 ans en arrière. J’ai fait l’armée dans le 6ème Régiment d’Artillerie à Phalsbourg en tant que Canonnier Grenadier Voltigeur dans le Poste de Commandement d’une batterie de Radars Mobiles. Rien que le nom m’amuse, même si je garde finalement de cette année d’armée un très bon souvenir humain. Plus de 150 jours de manœuvre par tous les temps avec des copains dont on garde à jamais le souvenir, durant lesquels j’ai été formé à coder des messages et à crypter des communications, à toucher une cible au fusil mitrailleur à plus de 400 mètres (ce qui m’a permis de gagner haut la main un concours de tir mémorable à la Kalachnikov contre les gardes d’une tribu du Yémen du Nord !), à prévenir et à décontaminer des unités victimes d’attaques Nucléaires, Biologiques, et Chimiques. Mais aussi à piéger un terrain, de la grenade dégoupillée coincée sous une arme laissée par terre en évidence, à la pose d’une MAPED, une Mine Anti Personnel à Effet Dirigé. Cela ne s’invente pas !
Une MAPED (Mine Antipersonnel à Effet Dirigé). L'engin me rappelle de vieux souvenirs. - A MAPED (Antipersonnel Mine with Directed Effect). The machine brings back old memories.
J’ai vu une MAPED démontée dans la vitrine de la salle de formation. Une MAPED, c’est 500 billes de métal projetées par un pain de plastic sur un angle de 60 degrés, qui explose lorsque l’on rompt un fil invisible placé en travers du chemin ou de l’espace que l’on veut piéger. Cela rase une forêt sur plus de 10 mètres et vous blesse mortellement jusqu’à 40 mètres. Bien que ses hommes soient formés au désamorçage d’une MAPED, Peter me confirme qu’il n’y en a pas au Cambodge. Elles sont bien trop chères.
Différents types de mines dans la salle de formation de la DU6 de la CMAC. - Different types of mines in the CMAC DU6 training room.
Il n’est normalement plus d’usage aujourd’hui dans l’armée française d’apprendre à miner un terrain. L’arrêt de l’usage des mines a fait l’objet d’une Convention internationale, dite d’Ottawa. Cette Convention est un traité international de désarmement qui interdit l'acquisition, la production, le stockage et l'utilisation des mines antipersonnel. 162 Nations, dont la France, ont ratifié cette Convention déposée le 5 décembre 1997 à New York auprès du secrétaire général des Nations unies, et qui est entrée en vigueur le 1er Mars 1999. 37 états ne l’ont pas signée, dont la Russie et les Etats Unis, alors que ces derniers financent une des divisions de la CMAC. « Cherchez l’Erreur » !
Prothèses de Mutilés par les Mines, des plus modernes aux plus archaïques. - Prosthetics for those Mutilated by Mines, from the most modern to the most archaic.
Il existe 6 DU de la CMAC, 2 financées par l’ONU, deux par les États-Unis, une par le Japon et une par l’Allemagne. Pour la DU6, le ministère des affaires étrangère allemand verse un budget annuel de 1,112 M€, sur les 20 M€ qu’ils allouent au déminage dans le monde. Selon l’ACAM, l’Autorité Cambodgien Anti Mines, qui régule et coordonne toutes les activités de déminage dans le pays, le coût total des opérations de déminage pour le Cambodge est d'environ 30 millions de dollars par an. Un Budget dont le Cambodge a besoin car la tache reste grande. Pour l’anecdote, il y a à peine deux ans, les hommes de la DU6 ont détruit plusieurs tonnes d’UXO découverts dans un canal à seulement 500 m des temples mythiques d’Angkor Vat. Et les experts estiment que le Cambodge aura besoin encore de 10 à 20 ans pour éliminer les 4 à 6 millions de mines toujours en activité sur le territoire, si toutefois le niveau actuel de financement est maintenu.
Peter Willier me présente l'arsenal de détection et de désamorçage des mines. - Peter Willier presents to me the arsenal of mine detection and defusing.
Je retrouve dans le discours et le bilan précis que me fait Peter, toute la rigueur allemande. Et je comprends entre les lignes que les allemands préfèrent financer eux mêmes une DU de la CMAC et y mettre à sa tête l’un de leur meilleur homme pour en mesurer et en tirer une efficacité maximum, plutôt que de subventionner à moindre frais une division via l’ONU, sans avoir l’assurance que l’argent versé soit correctement employé.
Peter Willier me présente l'arsenal de détection et de désamorçage des mines. - Peter Willier presents to me the arsenal of mine detection and defusing.
Peter Willier me présente l'arsenal de détection et de désamorçage des mines. - Peter Willier presents to me the arsenal of mine detection and defusing.
J’espère ne pas me tromper, car il est question au grand regret de Peter que le gouvernement allemand, soucieux de faire des économies, diminue ses subventions en confiant les rennes de la DU6 à une ONG Belge spécialisée dans le déminage, APOPO. Les ONG sont un business, le déminage aussi. De nombreuses ONG opèrent au Cambodge, et tant mieux. Mais loin de remettre en cause la foi émouvantes des milliers de jeunes qui animent ces ONG, il est de notoriété ici que seulement 39% du budget des ONG et des dons qu’elles récupèrent, arrivent jusqu’au « terrain ». APOPO a proposé de reprendre la DU6 contre moins d’un tiers du budget que verse le Ministère des Affaires Etrangères Allemand aujourd’hui.
Carnaval organisé dans Siem reap et Pub Street par les multiples ONG œuvrant pour le bien des orphelins et enfants mutilés du Cambodge. - Carnival organized in Siem Reap and Pub Street by multiple NGOs working for the good of orphans and mutilated children in Cambodia.
Mais Peter entend défendre prochainement son budget au Parlement Allemand et les résultats obtenus par la DU6 de sorte que le Ministère des Affaires Etrangères puisse en garder l’entier contrôle. Car il connaît bien APOPO et doute fortement des résultats que l’ONG obtiendra, et de l’utilisation qui sera faite des budgets qui lui seront alloués par les particuliers et le Gouvernement Allemand… Peter ne manquera pas de me mettre au courant car nous avons prévu que je l’accompagne l’an prochain lors d une mission de déminage sur la frontière Thaïlandaise …
Peter Willier me donne rendez vous pour une mission de déminage sur la Frontière Thaïlandaise, l'une des régions les plus minées du monde. - Peter Willier has arranged to meet me for a mine clearance mission on the Thai border, one of the most mined regions in the world.
Epilogue : J’ai envoyé à Peter l’article et les photos qui lui sont en partie consacrés. Peter m’a écrit une réponse dont voici quelques extraits :
Bonjour Yves,
… Merci pour votre reportage très intéressant. J’ai envoyé votre texte a quelques amis ainsi qu’à notre ancien ambassadeur (marié avec une Française). Tout le monde trouve ce texte très intéressant et très bien. J’espère que vous aurez la chance, de trouver un journal, qui va le publier…
J’ai quand même trouvé un petit faut. L’histoire avec les 6 Allemands et les 3000 para français n’était pas au Tchad mais à Djibouti où j’étais chef d’un groupe de conseillers de l’armée allemande. Ce n’est pas bien grave, et je suis surtout très intéressé de savoir dans quel journal vous allez publier ce reportage…
En ce qui me concerne, la DU6, la situation n’est pas bonne. Le ministère allemand a donné le projet à APOPO… Je suis en contact avec mes anciens collaborateurs Cambodgiens toutes les semaines. Ils sont très malheureux de travailler avec des Anglo-Saxons… Mean n’est plus le manager, il est devenu conseiller, et n’a rien à faire...
Je suis encore en contact avec des députes, mais cela prend du temps. L’actualité politique est chargée en Allemagne, beaucoup de sujets économiques et géopolitiques à régler. Et un petit projet au Cambodge n’est pas tellement important pour les hommes politiques. C’est bien dommage…
Je suis de retour en Allemagne, en train d’écrire un livre sur le Cambodge et les pays voisins. J’espère le terminer pour cette année...
Je n’ai malheureusement pas de meilleures nouvelles à vois annoncer pour le moment, et peu de chance d’aller ensemble près de la frontière thaïlandaise.
J’espère de meilleures nouvelles de votre côté
Amicalement
Peter Willers Programme Manager DU 6 CMAC Siem Reap, Cambodia P.O Box: 210
Antipersonnel Mines in Cambodia. From the legendary AKI RA to the little-known deminers of CMAC DU6.
" What are you doing here ? »
The man of almost two meters who calls out to me in impeccable French and officer's attire is Peter Willers, 73, a retired German army colonel, head of DU6 of the CMAC. I explained to him my real interest in his action, and the Colonel suggested that we talk after the “color survey” at 7:00 a.m.
It's 6:55 in the morning. I was invited to Siem Reap at sunrise to DU6 of the CMAC, the sixth demining division of the Cambodia Mine Action Center, a government organization in charge of demining the country.
Victim of intensive bombings during the Vietnam War, undermined by civil wars for decades, Cambodia is on the disastrous list of countries which have the most explosive devices in operation on their territory.
CMAC is one of four main organizations working on mine clearance in Cambodia. The other three are the Royal Cambodian Armed Forces (ARC), Halo Trust, and the Mines Advisory Group (MAG). These four organizations answer to ACAM, the Cambodian Anti-Mine Authority, which regulates and coordinates all mine clearance activities in the country.
We had fun with Isa and chose a heavenly hotel just outside Siem Reap to explore the splendors of Angkor Wat, the “Angkor Village Resrot and Spa”. A stone's throw from the hotel, I noticed a sign at the crossroads indicating the Germano Cambodian mine clearance unit DU6, 400 meters away. Guided by my curiosity, I leave Isa at the edge of the hotel swimming pool at the end of the afternoon to find the DU6 garrison. I find an almost deserted barracks. A young guard tells me that the unit is on a mission and advises me to come back the next morning when the colors are raised to be sure to meet an officer...
Mines are a daily reality in Cambodia. There are some 40,000 men, women and children in the country who are amputees, one of the highest rates in the world. It's difficult as a traveler not to come across Cambodians of all ages, blinded or crippled by an antipersonnel mine. It's difficult not to meet a Cambodian who doesn't have a loved one, a family member, affected by this scourge. Although it is decreasing year by year thanks to the action of demining organizations, the accident rate in Cambodia also remains one of the highest in the world. So much so that walking 10 meters in the jungle away from the roads to relieve yourself is considered unconscious in Cambodia. You will often hear that “It is better to relieve yourself along the road and lose your dignity than a leg!” ".
What led me to push the gates of the DU6 was a character from a novel, AKI RA, whose path we “crossed” with Isabelle, while we were returning by touk-touk from Bentea Sré, a temple magnificent north of Angkor Wat. We were stopped by the surreal sight of shells of all sizes erected on the side of the road to mark the famous “AKI RA Mining Museum”.
The place is much more than just a museum. The US$3 ticket you pay to an adorable Cambodian soldier at the entrance helps fund an orphanage behind the museum, providing shelter and education to dozens of children affected by landmines across the country. country. An orphanage whose vocation is to heal the wounds of the Body but also those of the Heart and Spirit of these children taken in by AKI RA.
A visit to the Museum, founded in 1997, will not leave you indifferent. We discover the long history of minefields in Cambodia, and the physical and economic devastation that they continue to cause to the populations. A long story of 35 years of bloody wars, told through the life of the museum's founder, AKI RA, a former child soldier of the Khmer Rouge.
Aki Ra is not sure of his age. He believes he was born in 1973, during the Vietnam War. The Viet Cong forces used Cambodia as a rear base at the time. And the American army launched unofficially, because it had not been approved by Congress, up to 3,000 air raids on Cambodia to dislodge the enemy guerrillas. An intensive shelling of 550,000 tons of bombs! 3 years earlier, General Lon Nol, supported by the United States, took advantage of a trip by the king to take power, and order massive mining of the border to contain incursions by communist troops, and prevent support from Vietnam to the Khmer Rouge guerrillas raging in the country.
In 1975, as the Vietnam War ended, Pol Pot and the Khmer Rouge entered Phnom Penh and took power. The civil war ends but “the hell of the Khmer Rouge” begins for the Cambodian population. The Khmer Rouge implemented the revolution advocated by Pol Pot. They assassinate anyone who resembles an intellectual. The simple fact of wearing glasses or knowing how to read is enough to put you through arms. Mass deportations, forced recruitment of young people into the army, mining of agricultural land, the Khmer Rouge did everything possible to eliminate Cambodians' ties to family and attachment to their land. The Khmer Rouge regime is bathed in unhealthy paranoia. Vietnam, a former ally, becomes an enemy, and the Khmer Rouge are once again frantically mining the border with Viet Nam.
AKI RA's parents were killed by the Khmer Rouge. Faced with the mass of Cambodians trying to flee Pol Pot's revolution and take refuge in its lands, Viet Nam reacted and the Viet Cong army invaded Cambodia to overthrow the Khmer Rouge regime. AKI RA, orphan, barely 10 years old, is forcibly enlisted in the Khmer Rouge army under penalty of suffering the same fate as his parents. He was sent into battle against the Vietnamese invasion and was immediately captured. The Vietnamese gave him the choice at 10 years old, between fighting against the Khmer Rouge in the Viet Cong army, or being killed as a Khmer supporter. He naturally chooses the first option….
The guerrillas lay mines “to defend themselves”, the Vietnamese army does the same. AKI RA, like other children from both camps, lay mines “all the time”. Mines are "the poor man's weapon", cheap, less than $3 per piece, easy to install, devilishly effective, a time-delayed weapon that can still kill 150 years after its installation... Mines are quickly establishing themselves as " the weapon of choice” by both parties.
The Viet Cong army quickly overthrew the Pol Pot regime. Phnom Penh is liberated but the Khmer Rouge guerrillas persist in the jungle bordering Thailand. The entire area is immediately mined at a breakneck pace. This is the “bamboo wall” project. The border provinces, made up of dense jungle, are dotted with mines and are becoming the most dangerous region in the world.
Then when the Vietnamese army leaves the country, AKI RA naturally enters the army formed by the new government of Cambodia. From there, tired of being a Cambodian who kills other Cambodians, he takes the reins of his destiny for the first time. He decides to devote his life to “repairing his mistakes”, and to use all his energy to clear the millions of mines that he helped to lay on the land of his own country.
It was not until 1998, and the surrender of the last Khmer Rouge rebels, that the real reconstruction of Cambodia began. But the fact that the countryside is undermined considerably slows down the country's economic recovery. Mines restrict access to agricultural land, pastures, forests and water resources. They indiscriminately strike soldiers, civilians and livestock, making it impossible to farm under these conditions.
AKI RA first returns to the villages where he himself has laid thousands of mines. Lacking the appropriate tools, he defuses the mines by hand, with a stick and a knife. He sells the mines and defused shells for scrap to help finance his work. He takes in many children injured by landmines and takes them to his home, where he and his wife raise them as their own, alongside their own children. The fame of AKI RA spreads by word of mouth in the countryside. Tourists hear about a young Khmer man who demines the country with a stick, and who has a house full of munitions defused.
AKI RA begins charging a dollar to view his collection, and uses the money to help continue his business. Thus were born “the AKI RA Mining Museum” and the NGO Self Help mine clearance (CSHD), which he created in 2008 to respond to the ever-increasing calls for help from village chiefs to clear mines and secure their land. … Such is the story of the legend Aki Ra, which should soon be “brought to the screen”…
The DU6 Minesweepers are at attention. It's 7:00 a.m. The radio plays the Cambodian anthem. Two soldiers raise the colors... The second officer gives the order to break ranks, the men greet each other and joke among themselves about having seen me take photos of the raising of the colors. Colonel Peter Willers gives me a quick overview of the troops and premises, and takes me to his office.
Peter Willers officiated in communications in Djibouti and Tunisia. It was there, surrounded by French soldiers, that he perfected his mastery of the French language. His networks at the German Foreign Ministry led him to accept mine clearance missions in different countries, in Bosnia, in Sarajevo in 97, in Kosovo, and finally in Chad in 2001. In Chad, he worked with French Paras, whose quality and efficiency he respectfully praises (coming from a German, the compliment is to be enjoyed). And to justify there being only 6 Germans for 300 French Paras, Peter told me with a smile that he often teased the French officers by telling them that the Germans rely much more on quality than quantity.
Peter shows me the book he wrote on the art of mine clearance. A book in which he pays tribute to his deputy who died in Chad. Peter was in Ndjamena to report to UN forces. His deputy took care of burying 10 tonnes of UXO alone, “unexploded shells”, as they are called. The 10 tons exploded too soon. And Peter tells me that he too should have died that day, and how we found his deputy's legs there and his head 200 meters away...
Peter Willers presents the results of DU6 to me. In the 5 years he has been at the helm, Peter has kept his balance sheet and productivity indices as carefully as a private company manager. He controls the number of mines defused and UXO destroyed, the average cost of defusing a mine, and the hundreds of thousands of square meters that he and his teams remediate each year to allow farmers to work the land in complete safety. And he follows, of course, the decline in the number of civilian victims of mines and UXO, from 850 per year in the early 2000s to 120 in recent years.
A deminer “pacifies” 75 to 100 m² per day. In 2013, DU6 destroyed 25,000 UXO defused or destroyed 4,000 mines, and allowed farmers to rework in complete safety on 5,000,000 m² of demined land. Peter explains to me with pride that the sharp decline in mine casualties is of course the result of mine clearance, but also of the awareness of his teams in the villages and schools among young children. In Cambodia, a quarter of mine accident victims are children heedless of danger, who do not hesitate to defy barbed wire and “mine danger” signs to fetch a lost balloon in the middle of a mined area.
CMAC Demining Unit 6 (DU 6), was born from an agreement between the German Foreign Ministry and the government of Cambodia in 1999, to take charge of mine clearance in the provinces of Oddar Meanchey and Siem Reap. In terms of qualification, safety and results, the CMAC DU6 with Peter Willers at its head, serves as a benchmark and is considered one of the best demining units in Cambodia. As a sign of recognition for his action, Peter Willers was decorated with the Royal Sahemetrei (Knight of the Legion of Honor) by Hor Namhong, Cambodian Deputy Prime Minister and Minister of Foreign Affairs and Cooperation.
The quality of DU6 is based on its management, but also on the qualification of the 305 men who make it up, the majority of whom are former Cambodian soldiers. Thanks to the continuing training he provides them, Peter is proud not to report any accidents within his teams since he has been in charge. He shows me how his units operate. Heavily protected men who clear the surrounding area with a bulldozer then with wire cutters. Then come the deminers with their more or less sophisticated detectors, the “Gamelle” (minilab) for mines, and more sensitive detectors for UXO buried deep in the ground. He shows me all the types of mines encountered in the field, the devices dissected and the appropriate keys to defuse them.
Peter and his men come close to death. He shows me photos of three farmers who recently died after driving over an anti-tank mine. Anti-tank mines, with their 5 kg of explosives, are the most destructive. When Peter's men detect an anti-tank mine, the instructions, before defusing it with the appropriate tools, are to attach a 25-meter line to it and shoot at it! The Khmer Rouge used to trap anti-tank mines by placing them on a second mine initiated by the weight of the first.
I am fascinated by Peter's stories which take me back 25 years. I served in the army in the 6th Artillery Regiment in Phalsbourg as a Gunner Grenadier Voltigeur in the Command Post of a Mobile Radar battery. Just the name amuses me, even if I ultimately have very good human memories of this year in the army. More than 150 days of maneuver in all weathers with friends who we will remember forever, during which I was trained to code messages and encrypt communications, to hit a target with a machine gun at more than 400 meters (which allowed me to handily win a memorable Kalashnikov shooting contest against the guards of a tribe in North Yemen!), to prevent and decontaminate units victims of Nuclear, Biological, and Chemicals. But also to trap land, from the unpinned grenade stuck under a weapon left on the ground in plain sight, to the laying of a MAPED, a Directed Anti-Personnel Mine. This cannot be invented!
I saw a dismantled MAPED in the window of the training room. A MAPED is 500 metal balls projected by a piece of plastic at an angle of 60 degrees, which explode when you break an invisible wire placed across the path or space you want to trap. This flattens a forest for more than 10 meters and mortally wounds you up to 40 meters. Although his men are trained in defusing a MAPED, Peter confirms to me that there are none in Cambodia. They are way too expensive.
It is normally no longer customary today in the French army to learn how to mine land. Stopping the use of mines was the subject of an international convention, known as the Ottawa Convention. This Convention is an international disarmament treaty which prohibits the acquisition, production, stockpiling and use of antipersonnel mines. 162 Nations, including France, have ratified this Convention deposited on December 5, 1997 in New York with the Secretary General of the United Nations, and which entered into force on March 1, 1999. 37 states have not signed it, including Russia and the United States, while the latter finances one of the divisions of the CMAC. " Find the mistake " !
There are 6 CMAC DUs, 2 funded by the UN, two by the United States, one by Japan and one by Germany. For DU6, the German Foreign Ministry pays an annual budget of €1.112 million, out of the €20 million they allocate to mine clearance worldwide. According to ACAM, the Cambodian Anti-Mine Authority, which regulates and coordinates all mine clearance activities in the country, the total cost of mine clearance operations for Cambodia is approximately $30 million per year. A Budget that Cambodia needs because the task remains large. For the record, barely two years ago, the men of DU6 destroyed several tons of UXO discovered in a canal just 500 m from the mythical temples of Angkor Wat. And experts estimate that Cambodia will need another 10 to 20 years to eliminate the 4 to 6 million mines still active in the territory, if the current level of funding is maintained.
I find in the speech and the precise assessment that Peter gives me, all the German rigor. And I understand between the lines that the Germans prefer to finance a CMAC DU themselves and put one of their best people at its head to measure and get maximum efficiency from it, rather than subsidize a division at a lower cost via the UN, without having the assurance that the money paid is correctly used.
I hope I am not mistaken, because to Peter's great regret there is talk that the German government, keen to save money, is reducing its subsidies by entrusting the reins of DU6 to a Belgian NGO specializing in demining, APOPO. NGOs are a business, as is mine clearance. Many NGOs operate in Cambodia, and so much the better. But far from calling into question the moving faith of the thousands of young people who lead these NGOs, it is well known here that only 39% of the NGO budget and the donations they collect reach the “field”. APOPO offered to take over DU6 for less than a third of the budget paid by the German Foreign Ministry today.
But Peter intends to soon defend his budget in the German Parliament and the results obtained by the DU6 so that the Ministry of Foreign Affairs can keep full control. Because he knows APOPO well and strongly doubts the results that the NGO will obtain, and the use that will be made of the budgets allocated to it by individuals and the German Government... Peter will not fail to inform me because we have plan that I will accompany him next year on a mine clearance mission on the Thai border...
Epilogue: I sent Peter the article and the photos which are partly dedicated to him. Peter wrote me a response, of which here are some extracts:
Hello Yves,
… Thank you for your very interesting report. I sent your text to a few friends as well as to our former ambassador (married to a French woman). Everyone finds this text very interesting and very good. I hope you will be lucky enough to find a newspaper that will publish it…
I still found a small fault. The story with the 6 Germans and the 3000 French paratroopers was not in Chad but in Djibouti where I was head of a group of advisors to the German army. It’s not a big deal, and I’m especially very interested to know in which newspaper you are going to publish this report…
As far as I am concerned, the DU6, the situation is not good. The German ministry gave the project to APOPO… I am in contact with my former Cambodian colleagues every week. They are very unhappy working with Anglo-Saxons... Mean is no longer the manager, he has become an advisor, and has nothing to do...
I am still in contact with MPs, but it takes time. Political news is busy in Germany, with many economic and geopolitical issues to resolve. And a small project in Cambodia is not that important for politicians. It's too bad…
I am back in Germany, writing a book about Cambodia and neighboring countries. I hope to finish it this year...
Unfortunately, I have no better news to announce at the moment, and little chance of going together near the Thai border.
I hope for better news from your side
Kind regards
Peter Willers Program Manager DU 6 CMAC Siem Reap, Cambodia P.O Box: 210
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